Ame rieuse. Qui a ri à la joie. Qui a ri au bonheur. Qui a ri au défrisement de nos rides. Comment écrit-on sur Kadi Moss, notre amie happée par l’atrocité de l’éternité ? Sublime de ses douces agressions matinales. Sublime de ses soins d’allure maternelle, d’un col qu’elle ajustait, d’une cravate qu’elle renouait ou d’une parure qu’elle magnifiait sublimement, Moss était l’expression raffinée de la dévotion et du service.

Mais tout ceci n’est que réducteur d’une âme à l’humanité telle qu’on y trouvait à la fois de la rigueur et de la ténacité, de la fragilité et de l’empathie encore plus. Elle pleurait. Souvent. Elle pleurait des silences de sa vie, mais pas que. Moss pleurait surtout pour et avec ceux qui pleuraient. Elle traînait leurs chagrins et leurs amertumes. Elle a pleuré les larmes de son corps pour dire adieu à Prinsco et à Cherif Diallo. Elle s’est émue et a pleuré le sort des rejetons de Michel Tolno. Moss a pleuré la misère de tous.

Mais Moss n’eut pas qu’une vie irradiée d’effluves joyeux. Oh que non ! Ses dernières heures ont été sombres, éprouvantes et fatalement impitoyables. Alitée, elle a vu sa vie la répudier. Elle a vu sa vie refouler ses avances désespérées. Elle a vu sa vie lui préférer la mort. Mais d’elle, nous pouvons dire comme Anatole France d’Emile Zola :
« Envions-la : elle a honoré sa patrie et le monde par une œuvre immense et par un grand acte. Envions-la, sa destinée et son cœur lui firent le sort le plus grand : elle fut un moment de la conscience humaine ».