1992- 2019, cela fait exactement 27 ans depuis que l’Organisation des Nations Unies a dédié une journée mondiale aux personnes à mobilité réduite. À l’image des autres pays, la Guinée va célébrer cette opportunité offerte à ces porteurs d’handicap ce mardi, 03 décembre sous le thème  » favoriser la participation sociale des personnes handicapées et leur pouvoir d’agir un geste à la fois ». À la rencontre de Mamadou Sow, victime de cet handicap suite à une tuberculose osseuse depuis 2007, cet étudiant en licence 3 Communication nous confie que la rue n’est en aucun cas, une solution pour une personne comme lui.
Maguineeinfos.com: Le monde célèbre le 03 décembre de chaque année, une journée mondiale dédiée aux handicapés. Dites-nous ce que cela représente pour vous et comment appréciez-vous cette initiative de l’ONU?
Mamadou Sow : Je commencerai par rappeler que c’est depuis en 1992 que l’ONU a réservé ce jour là pour les personnes handicapées. Cela pour prouver non seulement à la société leur existence, mais pour également remonter leur morale. C’est pourquoi j’apprécie cette initiative et je suis vraiment content pour la célébrer avec mes frères et sœurs handicapés.
Vous êtes porteur de cet handicap depuis 2007 et aujourd’hui étudiant. Racontez-nous un peu comment cela est arrivée?
Vous savez, j’aime souvent dire, être handicapé c’est la destinée mais savoir vivre avec son handicap c’est l’art. Il faut toujours avoir le courage et la détermination afin de surmonter certaines épreuves de la vie. C’est le bon moment de le souligner que c’est la volonté de Dieu qui fait de quelq’un un handicapé bien que ce n’est pas facile. Car, on traverse beaucoup de choses qui peuvent même nous décourager de la vie à un certain moment. Mais avec le courage on y arrive toujours. Sinon, je peux dire que parfois le gros problème d’abord c’est dans nos propres familles. Les parents eux considèrent que quand on est handicapé c’est justement ta volonté et du coup tu te trouves marginalisé. Moi mon cas, c’est une maladie qui a commencé début 2007, sinon j’étais comme les autres. Mais petit à petit je boîtais et par la négligence des parents qui disaient souvent que ce sont des diables ou autres choses et la situation ne faisait que s’aggraver. Finalement, on est allé très tard à l’hôpital et c’est là qu’on m’a dit que c’est une tuberculose osseuse qui ne faisait que déformée mes os. Le médecin nous avait ordonné pour une évacuation à l’extérieur mais les moyens n’y étaient pas là. Ce qu’il faut dire, c’est que cela ne m’a pas poussé à abandonner les études , même si j’avais perdu beaucoup en intelligence sinon, j’étais quelq’un très intelligent à l’école mais avec ce que je traversais, mon niveau a beaucoup baissé. Malgré tout, j’ai fait en sorte que je puisse surmonter ce temps car, je sais qu’avec les études , je vais être autonome un jour, sans être au dos de quelqu’un.
Nous savons que l’intégration en société pour la plupart d’entre vous n’est pas chose aisée. Dites nous comment se passe votre collaboration entre famille d’abord, entourage et amis?
Personnellement, je dirai que mes amis m’acceptent plus que ma famille. Ils me soutiennent et me moralisent tant. Au début, j’avais complétement désespéré et dommage, le moment que j’ai pris le courage de bien étudier, mon propre père m’a dit d’abandonner et c’est en ce moment que je faisais le Bac. Il m’a fait savoir que lorsque j’aurai mon examen, qu’il n’y aura pas ces moyens, puisqu’il ne saura pas où l’État va m’orienter. Mais j’ai fait de n’importe quoi pour me soutenir moi même pour que je décroche mon Bac.
Après être admis, j’ai été orienté à Kankan pour faire la Sociologie mais, j’avais remarqué beaucoup de nos frères qui ont fait ce départements pareils mais que pleins sont devenus des enseignants et moi mon état n’allait pas me le permettre. C’est ainsi, je suis venu à Conakry pour négocier, puisque c’est le Journalisme j’ai voulu faire depuis. Alors je me suis battu pour aller voir le ministre de l’Enseignement Supérieur qui m’a demandé de choisir une université privée qu’il allait payer mais, quand il a su que c’est le journalisme que je voulais, il m’a conseillé donc d’être à l’ISIC de Kountia. Et depuis là, mes amis m’encouragent et tout va mieux grâce eux.
D’aucuns pensent que l’handicap est une fatalité et se livrent par fois même à la mendicité. Alors que vous, malgré votre état, vous vous n’êtes pas inscrit dans cette dynamique pourquoi ?
Mamadou Sow, étudiant en communication

Moi je me dis que ceux-là qui se livrent à la mendicité, sont des gens qui ont perdu la foi en Dieu. C’est vrai, quand tu es handicapé, tu es marginalisé et rejeté par certaines personnes. Mais qu’ils comprennent que la rue n’est pas une solution. Mais qu’ils disent que oui, je suis handicapé de par mes membres supérieurs ou inférieurs mais je peux faire telle ou telle chose et me mettre à la tâche qu’au lieu de prendre la rue parce que là-bas d’autres peuvent leur donner de l’argent mais avec un mauvais œil. Pourtant il y a pleins d’handicapés qui ont traversé beaucoup de souffrances mais qui ont finalement réussi et vivre mieux aujourd’hui. Alors moi je trouve bizarre cette attitude de ceux d’entre nous qui pensent que la vie d’un handicapé est résumée à la rue.

Un mot sur vos difficultés rencontrées dans votre vie d’handicap ?
Elles sont nombreuses mais c’est surtout le problème d’un moyen de déplacement qui puisse permettre d’être à l’école à l’heure. À l’école aussi, lorsque tu as envie de te mettre à l’aise, tu es obligé de prendre ton mal en patience et attendre tout le monde. Et avec les petites malades aussi, surtout quand on a pas de soutien ça devient trop compliqué. Je ne pourrai pas tout citer mais je l’ai considère comme le passé. Sinon même à l’heure dont je vous parle, j’ai une difficulté mais avec le courage et la foi en Dieu, je sais que ça va aller.
Quel message à l’endroit de vos amis handicapés qui pensent qu’une personne à mobilité réduite est différente des autres ?
Comme message, je leur rappelle qu’il faut avoir la fierté quand on est handicapé. C’est quelque chose que Dieu t’a donné et on ne peut pas s’emprendre à quelqu’un. Tu peux te voir bien portant aujourd’hui et demain handicapé. Puisqu’il y a des cas de maladies, des accidents mais, il faut toujours considérer que c’est un problème de destin et te battre en faisant certaines choses conformément à ton handicap afin de gagner sa vie. Sinon, moi mon papa m’a carrément demandé de me confier au Coran afin que je puisse devenir un marabout. Mais j’ai tenu tête et c’est pourquoi, il y a toujours des problèmes entre lui et moi. À part le loyer, tout le reste, notamment la scolarité de mon jeune que j’ai fait venir ici, c’est moi même qui gère.
Quelques plaidoiries à l’endroit des autorités étatiques à l’occasion cette journée ?
Je dirai tout simplement aux autorités, comme nous les handicapés, nous occupons les 1,5 % de la population, de nous traiter comme ça se fait dans les autres pays. Surtout les moyens de déplacement. Sinon j’ai une familles à la T6 mais, je ne peux pas m’y rendre si je ne déplace pas un motard. Aussi, nous faciliter l’accès dans les différentes institutions et créer les centres de formation pour les personnes handicapées qui n’ont pas eu la chance d’etudier et ou continuer afin de trouver un cadre pour les permettre de gagner leur vie sans la rue.
Votre mot de fin?
Pour terminer je renderai hommage à mes amis de l’institut de Kountia que je ne finerai jamais de remercier. Depuis que j’ai mis mon pied à là-bas, ils ne m’ont jamais laissé. Je ne connaissais personne et j’avais complétement désespéré. Mais j’ai toujours reçu leurs conseils et ils m’ont considéré comme un bébé. Je n’ai jamais chargé l’un d’entre eux en commission et qu’il m’a refusé. C’est seul le Tout Puissant Allah qui peut les payer car, c’est grâce à leurs encouragements que je vais finir mes études de 4 ans de l’ISIC.
Entretien réalisé par Sâa Robert Koundouno