Qualifié de quatrième pouvoir, le journalisme est une profession qui sert d’intermédiaire entre gouvernants et gouvernés. De la collecte à la diffusion de l’information en passant par le traitement, le journaliste est tenu obligé d’observer le minimum de professionnalisme. Ancien journaliste à la RTG, Mamady Yaya Cissé est aujourd’hui le Directeur général adjoint chargé des études à l’institut supérieur de l’Information et de la Communication (ISIC) de Kountia. Dans cette interview exclusive qu’il a accordée à notre rédaction, il donne son point de vue par rapport à l’exercice du métier de journaliste en Guinée mais aussi, parle des réformes qu’il a entreprises au sein dudit institut.
Maguineeinfos.com : Quelles analyses faites-vous du travail des journalistes guinéens ?
Mamady Yaya Cissé : Les professionnels guinéens des médias sont mélangés. Aujourd’hui, le secteur de l’information et de la communication est devenu pourvoyeur d’emploi. Il y a des étudiants qui ont fait sociologie, il y en a qui ont fait les lettres, d’autres ont fait le droit, etc., ils n’ont pas où travailler. C’est eux qui viennent tout de suite prendre d’assaut les emplois du secteur de l’information et de la communication avec quelques acquis de la formation en journalisme ou bien en communication, ils se disent journalistes ou communicants. Or, ils ne le sont pas, parce que tout simplement ils savent qu’ils peuvent travailler facilement dans ce secteur, ou bien dans ce secteur ils ont une connaissance qui leur facilite la tâche. Si vous observer le travail de ceux-ci, vous vous rendrez compte qu’en Guinée, la profession de journaliste regorge assez de brebis galeuse. Mais à ce que je sache, des étudiants qui sortent de l’ISIC de Kountia sont vraiment professionnels. En guise d’illustration, le premier Directeur de BBC Afrique Ibrahima Diané, a été formé par notre école, il est aujourd’hui le chargé de communication du Haut Commissariat aux réfugiés (HCR) à l’Est de la RDC. Makemin Bamba qui l’a remplacé, est sortie de l’ISIC. Le rédacteur de la télévision nationale est de l’ISIC tout comme Aya Diawara l’une des meilleures animatrices culturelles de la sous région. Aboubacar Diallo de la radio Espace y compris son confrère Aboubacar Camara de la RTG, viennent de l’ISIC.
Depuis votre nomination au poste de DGA-E en 2018, quels sont les changements que vous avez apportés dans le cadre des études ?
J’ai apporté un grand changement. Je suis venu trouver que l’enseignement à l’ISIC est déjà dépassé. Quand on ouvrait l’ISIC à l’époque, on formait des journalistes et des communicants. Or, avec l’évolution technologique des médias, actuellement on forme des journalistes et communicants à la fois modernes mais aussi, polyvalents. C’est cette modernité qui manquait à l’ISIC de Kountia. Pour avoir un pied dans la polyvalence, il faut maîtriser tous les médias, tel n’était pas le cas au sein dudit institut. Quand j’ai été nommé en 2018, j’ai trouvé que les étudiants en journalisme étaient répartis entre les options presse écrite et audiovisuel, tandis qu’au département communication, certains étudiants étaient en communication sociale et d’autres en communication d’entreprise. Un étudiant formé uniquement en presse écrite aura du mal à travailler en audiovisuel. Cependant, du jour au lendemain, des journaux papiers disparaissent face à l’offensive des technologies de l’information et de la communication, c’est-à-dire des journaux en ligne. Aujourd’hui, les gens n’ont plus le temps d’enlever 3.000 GNF pour s’acheter un journal, or, avec 1.000 GNF de connexion, ils peuvent faire le tour des sites d’informations générales qui remplacent de plus en plus les agences de presse. Ils sont devenus même des sources d’informations des médias traditionnels que sont le journal écrit, l’agence de presse, la radio et la télévision. Désormais à l’ISIC de Kountia, c’est le tronc commun, c’est-à-dire la spécialisation est bannie. Des étudiants qui sortent de l’institut sont à la fois modernes et polyvalents.
Est-ce qu’il est possible pour une personne qui a suivi une formation dans un autre domaine d’étudier à l’ISIC sans faire les 4 ans exigés ?
C’est possible. Il y a des gens qui viennent pour juste prendre une compétence en communication sociale ou commerciale. Et c’est dans le cadre non seulement de la formation payante mais aussi, de la formation continue. Souvent des cadres qui sont postés ailleurs viennent suivre des cours à l’ISIC de Kountia pour renforcer leur capacité. Par exemple, quelqu’un qui vient suivre une formation dans un domaine précis, au terme de sa formation aura un certificat.
Quels sont les projets en cours de réalisation à l’ISIC de Kountia ?
Dans le cadre des études, l’ouverture du master en communication publique et politique sera effective bientôt. En plus de ça, nous avons un projet de formations des étudiants guinéens en immigration clandestine et objectif de développement durable. C’est un projet de six mois de formations, c’est-à-dire trois mois en théorie et les trois autres en pratique sur le terrain. Si nous réussissons, éventuellement ce projet va aboutir à un master en communication sur l’immigration clandestine, il y a déjà le Maroc qui développe un tel master donc ce sera facile de faire la même chose en Guinée surtout que nous sommes en partenariat avec l’ISIC de Rabat.
Propos recueillis par Mohamed Lamine Souaré