L’Afrique, à cause de la forte similarité qui caractérise ses nombreux États, a souvent offert des scenarii tout aussi pareils. En effet, la memeté du mal qui gangrène le contient a, à bien des égards, donné raison de dire que l’Afrique est la même, malgré les particularités significatives dont on ne saurait évidemment pas faire fi. Ainsi, l’allure à laquelle se sont enchaînés les coups d’Etat ces dernières années donne de quoi craindre aux faiseurs de mandats en Afrique. Un mandat de plus est souvent un mandat de trop, dit-on. Après le Mozambique, le Mali et le Tchad, voilà ce que nous craignions depuis le virage au 3ème mandat : un coup d’État militaire. À cause des tournures que prenaient les choses politiques et leurs incidences directes sur la précarité de la vie des populations. Avec toutes ces mesures impopulaires, plus personne ici ne peut dire qu’il soit réellement surpris. Mais dire que ce seraient les forces spéciales qui fassent ce coup d’État, il faut croire combien de fois les gens se sont laissés aveugler par des manœuvres politiciennes pour ne rien voir venir.

Ce coup d’État est probablement un coup de souffle, une lueur d’espoir pour nombre de guinéens. Les foules en liesse dans les rues de Conakry peuvent-elles être interprétées en signe de délivrance à cet effet ? Jusqu’à quand ? Jusqu’où ? Comment le Conseil National pour le Redressement et le développement (CNRD) réussira t-il sa mission ? On se rappelle encore du CNDD, Conseil National pour la Démocratie et le Développement, de ses erreurs de parcours et par dessus tout, de son échec à rendre utile une transition militaire. L’armée avait été acclamée pour faire le nettoyage, assainir la vie publique, mais elle s’est érigée en << problème véritable >> par la suite. C’est pourquoi, s’il est possible de voir dans ce coup d’État une certaine << succession logique des événements >>, il est tout aussi clair que rien de tout cela ne rassure pour autant.

Le problème ? C’est qu’il y a un dérèglement profond de nos institutions républicaines. Nous avons dépassé le point de non-retour depuis longtemps. Si le coup d’État reste effectif, il y aura beaucoup de choses à prendre en compte : le bouleversement de tout l’échiquier politique pour un premier temps et les autres éléments devraient suivre. Tout cela est inquiétant, parce que c’est un saut dans l’inconnu…

Ce que nous attendons, c’est :

1)-Tenir le cadre du dialogue comme nous l’avons préconisé, en ayant en conscience les raisons que nous ont amené à cette crise de confiance entre les acteurs de la vie publique.

2)- Prendre en considération les points soulevés par le MANIFESTE DE LA JEUNESSE GUINÉENNE de janvier 2021, ( signé par 51 jeunes guinéen(nes) de tous les bords confondus ), sur les mesures idoines face à << l’incapacité des structures juridiques et institutionnelles à prendre en compte les intérêts et les opinions de la jeunesse a contribué au maintien d’un système de gouvernement affranchi de toute obligation envers les citoyens.

3)- Appeler aux états généraux de la gouvernance politique, sociale et économique de notre pays, en vue de permettre plus de
<< moralisation de la vie publique >>, pour l’intérêt général.

4)- Veiller à l’indépendance et l’efficacité des institutions républicaines, notamment la justice pour faire valoir le règne de la loi et l’égalité entre les citoyens vis-à-vis de leurs droits et obligations.

5)- Rendre effectif les audits sur les détournements de fonds publics pour assainir la gouvernance économique et permettre la confiance des partenaires au développement.

6)- L’organisation des élections libres et transparentes pour ne pas répéter les mêmes erreurs du passé. Un président élu des urnes sera a même d’avoir toute la légitimité qui sied.

Nous ne voulons pas d’une transition précipitée aux résultats dérisoires. Nous attendons une véritable rupture. Le pays a besoin de RUPTURE SYSTÉMIQUE. Faudrait-il accompagner l’armée guinéenne aujourd’hui encore à jouer ce rôle salvateur, qui consiste à redonner à notre pays, sa renommé historique d’un peuple fier et glorieux ? On a applaudi en 1984 avec le Général Lansana Conté, le Capitaine Moussa Dadis Camara en 2008, et maintenant c’est au tour du Lieutenant-colonel Mamady Doumbouya. Mais il ne reste pas moins difficile dans l’esprit républicain de cautionner un Coup d’État, qu’il soit civile ( coup d’État constitutionnel ) ou militaire. Mais il est d’ordre pratique, en l’état actuel des choses – au-delà de nos réserves – de prendre acte de ce putsch, s’il permet à chaque Guinéen de mener une vie paisible et heureuse, si la motivation consiste à réveiller notre pays. Créer un << environnement où les besoins humains de base peuvent être satisfaits ; où il est possible à chacun, sans crainte, de jouir de la vie, d’étudier, de se soigner, de travailler humblement sans être soumis aux contraintes de réseaux informels ; où enfin le pouvoir est responsable de sa population. Pour ainsi réconcilier la politique et l’humain.>> Autrement, nous serons toujours là, rompus au combat patriotique.

Nos prières sont celles de réussir cette
<< TRANSITION >> qui s’annonce, en rendant UTILE ce putsch. Aller au-delà des personnes, pour poser les questions de RUPTURE et de REFONDATION, car nous aurons certainement beaucoup plus à perdre en cas d’échec.

Puisse Dieu protéger la Guinée.

Par Ali CAMARA