Demain, Samedi 2 Octobre 2021, le vaillant Peuple de Guinée célèbrera, sur fond de crise politique, institutionnelle et sanitaire que traverse notre pays, les 63 ans de son accession archétypale à la souveraineté internationale.
Oui ! Demain, cela fera exactement soixante-trois ans jour pour jour que notre pays, la République de Guinée, s’est, sous le magistère du responsable suprême de la révolution guinéenne et icône du panafricanisme, le camarade Ahmed Sékou Touré, affranchi de la colonisation pour devenir une Nation tout à fait libre de ses mouvements.
Comment comprendre qu’après plus de six décennies de liberté, la Guinée, ce territoire gratifié des ressources minières des plus fabuleuses reste encore loin et même très loin de la lumière au bout du tunnel ?
Indubitablement, de Sékou Touré au Professeur Alpha Condé, en passant par le Général Lansana Conté, tous ont eu à poser des actes qui méritent d’être encensés. Mais, comparativement à nos potentialités naturelles, beaucoup reste à faire.
Diantre ! Bien que possédant de considérables potentialités naturelles et humaines, la Guinée figure parmi les pays pauvres et occupe, dans le cadre du plus récent classement de l’indice de développement le 178ème rang sur 189 pays et territoires, un peu moins de la moitié des guinéens (44%) vivraient en dessous du seuil national de pauvreté estimé à 13717 GNF/Personne/Jour (1,1 euro).
Pourtant, en plus d’être le château d’eau de l’Afrique de l’ouest avec plus de 1.1OO cours d’eau, Dieu a gratifié notre Nation d’énormes superficies de terres agricoles, des richesses pouvant faire d’elle un véritable eldorado : or, diamant, bauxite, pierres, des métaux précieux en un mot.
Le constat est sans appel : l’écrasante majorité de la population est confrontée à de rudes épreuves pour joindre les deux bouts.
Le manque de patriotisme, ce grand mal guinéen !
Des hommes politiques d’ici créent toujours des rapports dangereux de rivalité entre des populations. Cela fait que tout le monde se méfie de tout le monde. Pire, ils discréditent notre pays à l’échelle internationale, créant ainsi la méfiance des investisseurs.
De l’autre, prisonniers du passé, les guinéens continuent, après soixante-trois ans de souveraineté, d’indexer la France et à tout bout de champ comme étant la seule et unique responsable de notre sous-développement.
Sans aucun doute, la France continue de nuire au développement de notre pays et a une certaine responsabilité dans les maux qui l’assaillent. Mais, nos dirigeants devraient-ils continuellement s’arc-bouter contre cela pour toujours justifier nos maux?
Loin de dédouaner cette puissance colonisatrice pour les crimes ignobles contre l’humanité qu’il a commis en Guinée pendant les soixante ans de joug et ses manœuvres qui visaient à déstabiliser l’Etat guinéen sous la première République, mais cela fait quand même 63 ans que nous sommes libres.
À vrai dire, le contexte guinéen rappelle cette belle affirmation de Georges Clemenceau: « Tout le monde peut faire des erreurs et les imputer à autrui : c’est faire de la politique»
Le pays de Mao a connu un sort pire que celui du nôtre. Dans les années 40, il était presqu’au même niveau de développement que beaucoup de pays africains. Mais aujourd’hui, il est la deuxième puissance économique mondiale. Là-bas, des gens ont rêvé grand.
Clairement, tant que nous, guinéens, ne reconnaissons pas les responsabilités qui sont les nôtres et n’assumerons pas à fond notre souveraineté, nous continuerons à tournoyer comme une toupie, ça va dans tous les sens, mais le développement escompté tardera toujours à venir.
Plutôt que de célébrer cette date historique demain, ce serait mieux d’interroger notre vécu commun. Interrogation au cours de laquelle sera passée au peigne fin, sans ambages aucun, l’étiologie du retard de notre pays. Qu’est-ce qui a marché, qu’est-ce qui n’a pas marché dans la gestion de la chose publique et pourquoi cela n’a pas marché?
Cette démarche, certes délicate mais fondamentale, permettra à coup sûr d’identifier les maux dont souffre notre patrimoine commun afin d’y apporter des remèdes adéquats.
En un mot, que chacun de nous se remette en cause, car nous avons été incapables de faire de notre belle Guinée un pays plus uni qu’avant (premier régime).
Le peuple ?
Le Président américain, Monsieur John Fitzgerald Kennedy, nous enseigne : « Ne demande pas ce que ton pays peut faire pour toi, demande ce que tu peux faire pour ton pays.»
Le Peuple ne doit spéculer que le développement est seulement l’affaire de ceux qui sont aux commandes. C’est l’affaire de tous. Des dirigeants à eux seuls ne peuvent bâtir une Nation. Il faut sortir de cette mentalité comme on l’entend souvent : c’est aux gouvernants de faire ceci ou cela. Une Nation se construit à travers l’implication et la détermination citoyenne et politique de tous les fils.
D’ailleurs, ne dit-on pas que la maison commune n’est belle que lorsque chacun y reconnait sa part de labeur ?
Nous devrions dorénavant consacrer notre énergie aux vraies questions de développement, de renforcement du tissu social, plutôt que faire la politique politicienne. Malheureusement, si nous ne nous entredéchirons pas pour des raisons politiques, nous sommes dans de petits agiotages genre tel est de telle ethnie, tel autre de telle ethnie.
Le retard de la Guinée est d’abord mental avant d’être conjoncturel, structurel et infrastructurel.
En plus de qualifier davantage les ressources humaines et de revoir ses relations avec les autres Nations du monde, la Guinée doit changer sa politique de développement, car celle appliquée, purement calquée sur le modèle occidental, ne tient aucunement compte de nos réalités.
Par ailleurs, le FMI et la Banque Mondiale distraient le berceau de l’humanité et constituent de véritables goulots d’étranglement de son économie. À la solde des grandes puissances occidentales, ces deux institutions n’ont autre mission que de maintenir les Etats africains dans la précarité. Leurs aides sont empoisonnées.
Notre pays, avec toutes les potentialités naturelles (minières et agricoles) dont il dispose, pourrait orgueilleusement se passer du dictat de la Banque Mondiale, du FMI, du Club de Paris, que sais-je encore !
« Le sous-développement est une maladie que seule la prise de conscience des dirigeants et des dirigés peut guérir », a dit Pascal Ahouanvoegbe.
Comparaison n’est pas raison, mais trente ans en arrière, Doubaï/ Emirats Arabes Unis étaient un désert. Là aussi, des gens ont rêvé et ce pays est aujourd’hui parmi les plus enviés de la planète. Pourquoi, la Guinée ne peut pas rêver grand, elle aussi ?
« El pueblo unido jamàs serà vencido» (le Peuple uni ne sera jamais vaincu).
Que Dieu protège notre chère Guinée. Amine ! Resplendissant pays, nous t’aimons fort !
Bonne fête de l’indépendance à toutes et à tous !
Par Sayon MARA, Juriste