Préambule :
«Article 1 : La Guinée est une République unitaire, indivisible, laïque, démocratique et sociale.
Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race, d’ethnie, de sexe, de religion et d’opinion. Elle respecte toutes les croyances.
Article 4 : La loi punit quiconque, par un acte de discrimination raciale, ethnique ou religieuse, par un acte de propagande régionaliste ou par tout autre acte, porte atteinte à l’unité nationale, à la sécurité de l’État, à l’intégrité du territoire de la République ou au fonctionnement démocratique des institutions.
Article 7 : Chacun est libre de croire, de penser et de professer sa foi religieuse, ses opinions politiques et philosophiques.
Tous les êtres humains sont égaux devant la loi. Les hommes et les femmes ont les mêmes droits.
Article 8 : Nul ne doit être privilégié ou désavantagé en raison de son sexe, de sa naissance, de sa race, de son ethnie, de sa langue, de ses croyances et de ses opinions politiques, philosophiques ou religieuses.
Article 14 : Le libre exercice des cultes est garanti. Les institutions et les communautés religieuses se créent et s’administrent librement[1]. »
« La Guinée est un pays laïc et démocratique. Pour cela, aucun musulman n’a le droit de combattre une autre personne qui ne pratique pas l’islam. Toutes les religions doivent s’exercer dans la liberté. Vous qui êtes des Imams, vous devez apprendre aux gens que l’islam est une religion de paix, de tolérance et de l’entraide sociale…. », Déclaration du chef de l’Etat, Pr. Alpha Condé, présent à la cérémonie d’ouverture de la quatrième conférence islamique nationale[2].
« Nous avons décidé d’organiser cette conférence islamique, pour expliquer aux gens que l’islam est une religion de paix et de tolérance. Nous avons des gens qui profitent aujourd’hui, au nom de la religion musulmane, pour causer des dommages à autrui. Nous voulons aussi que les imams et prêcheurs de Guinée échangent sur tous les problèmes liés à la pratique de la religion» Elhadj Abdoul Karim Dioubaté, Secrétaire Général des Affaire Religieuses.
Situation Géographique :
La Guinée-(Conakry)[3], appelée officiellement république de Guinée, est un pays d’Afrique de l’Ouest borné par l’océan Atlantique, limité au nord-ouest par la Guinée-Bissau (lusophone), au nord par le Sénégal (francophone), à l’est par le Mali (francophone), au sud-est par la Côte d’Ivoire (francophone) et au sud par le Liberia (anglophone) et la Sierra Leone (anglophone).
C’est un pays de 245 857 km², soit l’équivalant de 50 % approximativement de la surface de la France. La Guinée comprend également les îles de Los au large de Conakry, la capitale. Plus de 1,5 million de Guinéens habitent Conakry qui est aussi une importante ville portuaire.
La Guinée est divisée en quatre grandes régions (voir la carte détaillée): d’est en ouest, on trouve la Guinée maritime ou Basse-Guinée (en bordure de l’Atlantique), la Moyenne-Guinée ou le Fouta-Djalon (au sud du Sénégal: de hauts plateaux aux nombreux cours d’eau désignés comme le «château d’eau» de l’Afrique), la Haute-Guinée (une immense savane formant une zone de transition avec le Mali) et la Guinée forestière (région de montagnes couvertes de forêts à l’extrémité sud-est, près du Liberia).
Pourquoi ce projet :
Ce projet de recherche se propose de remettre à plat la problématique de l’organisation de la religion en République de Guinée. Il cherche à mettre en exergue la nécessite de mener une étude sérieuse sur ce secteur phare de la stabilité et de la quiétude sociale, dans un pays où la foi est ancrée dans la vie de tous les jours des citoyens, d’autant plus que 95 % de la population se dit profondément croyant. Laisser pour contre ce secteur, sans surveillance ni bonne gouvernance serait d’exposer la nation toute entière aux risques et au péril du fanatisme religieux et aux dérives comportementaux qui s’exercent au nom de la foi. L’Afrique a un grand potentiel pour devenir le continent de l’avenir, puisque plus de la moitié de la population qui la compose sont très jeune. Ce qui lui confère une immense perspective démographique dans les années à venir.
Pour ce faire, nous allons nous appuyer sur les quelques données qu’on a pu recueillir, les articles de lois, articles de presses et les sujets de débats lancés sur les réseaux sociaux, et surtout des informations personnelles dans ce domaine.
Le cadre général :
Il sied de mettre en évidence qu’il n’est pas tâche facile de recueillir les récentes informations et statistiques sur la Guinée, les recherches les plus sérieuses dans ce domaine remontent à 1955, c’est-à-dire avant l’indépendance (1958). C’est pourquoi nous trouvons des données statistiques qui sont en déphasages avec la réalité de nos jours. A titre d’exemple, selon les études qui datent d’avant l’indépendance, la Guinée comptait une population de 7.164.823 habitants dont 2 millions vivant en l’étranger. A ce chiffre, il faut ajouter environ 650.000 réfugiés en Guinée venus de Sierra Leone et du Libéria et plus récemment de la Côte d’Ivoire voisine.
Il se trouve que ces données ne sont plus d’actualité, car, il n’y a plus de guerre ni en Sierra Leone ni au Libéria encore moins en Côte d’Ivoire. Certains statistiques estiment le nombre de la population Guinéenne a 12.000.000 habitants[4], dont environ 50 % de jeunes. L’Esperance de vie est de 59,2 ans[5].
Très peu de données sur le recensement basé sur les groupes ethniques, le dernier remonte à l’avant l’indépendance comme susmentionné. Toutefois ; sur la base de ces données, on sait qu’il existe en Guinée une trentaine d’ethnies parmi lesquelles on distingue 3 groupes importants :
- Les Peulhs (40 % en 1955), qui sont des éleveurs semi-nomades venus d’un peu partout en Afrique, notamment du Sahel Sénégalo-mauritanien et du Macina (Mali). Ils vivent surtout au Fouta Djallon en (moyenne Guinée).
- Viennent ensuite les Mandinkas ou Malinkés (35 % en 1955) originaire de la Haute Guinée qui faisait partie des puissants royaumes mandingues qui y ont régnés pendant des siècles. Les Mandenkas font partie du groupe ethnique des Mandingues qui habitent aussi dans plusieurs régions de l’Afrique de l’Ouest, notamment en Guinée Bissau, en Gambie, en Côte d’Ivoire, au Mali, au Burkina Faso … etc.
- Puis les Soussous (15 %), qui habitent dans la zone côtière de la Basse Guinée, notamment dans la Capitale Conakry.
- En moindre importance viennent les Guerzés, les Kissia, les Tomas, les Landoumas, ou encore les Bagas …
Le français est la langue officielle en Guinée, mais seulement 15 à 20 % des Guinéens le pratiquent. Il sert de langue véhiculaire dans les grandes villes avec le Soussou, le Malinkés et le Peul.
Les religions en Guinée :
Cadre juridique :
La Constitution stipule que la Guinée est un État laïc, interdit la discrimination fondée sur la religion et reconnaît le droit des personnes de choisir leur religion et de la pratiquer. Elle reconnaît également le droit des institutions et des groupes religieux de s’établir et de gérer librement leurs activités. Elle interdit les partis politiques qui s’identifient à un groupe religieux particulier.
Le dernier rapport de l’ambassade des Etats-Unis en Guinée indique que l’Islam est la principale religion en Guinée, plus de 85% de la population avec plus de 75 % de pratiquants, vient en seconde position la confession chrétienne 10 %[6]. Les autres suivent les religions traditionnelles 5 %. La plupart des chrétiens vivent en Guinée forestière et à Conakry.
Les animistes[7] sont essentiellement en Guinée forestière et en petit nombre en Haute Guinée.
La mésentente religieuse n’existe pas en Guinée. Le mariage mixte entre musulmans et chrétiens en est la preuve. Il existe en Guinée de nombreuses familles musulmanes qui fêtent Noel.
Les religions africaines reposent toutes sur un théisme plus ou moins clairement conçu. Dans l’ensemble, on croit à un Dieu, créateur unique du ciel et de la terre, et dénommé par emprunt à l’Islam de manière identique, à quelques altérations près, dans les diverses populations :
Allah, Allahou (Peuls, Malinké, Soussou et islamisés)
Halla (Kissia)
Yalla (Kono)
Wala (Manon)
Gala (Toma)
L’essentielle bonté de ce Dieu, dont la connaissance demeure syncrétique et confuse, rend inutile tout effort des humains pour se le concilier.
Il faut tuer l’embryon du fanatisme dans l’œuf par la maitrise parfaite de la religion :
Connue pour sa stabilité et son pacifisme sur le plan religieux, la Guinée, depuis plus d’une décennie, est en passe de devenir une contrée propice à l’émergence de l’extrémisme religieux. Des enquêtes menées par certains journalistes investigateurs[8] dans certains quartiers de la Capitale Conakry édifient sur l’existence de certains foyers religieux qui propagent des doctrines et des idées d’un islam idéologique. Car, en fait, contrairement à ce que beaucoup pensent de nos jours, l’Islam était très tolérant dans le passé et le reste encore dans les sociétés moins influencées par la doctrine wahhabite ou chiite qui rivalisent dans l’intolérance aujourd’hui.
Conditionnées par la haine d’un Occident injuste, provocateur et défenseur d’Israël, ces deux doctrines détournent l’islam à des fins idéologiques et manipulent les croyants.
Des signes d’extrémisme apparentes, s’il ne tenait qu’à cela, il y aurait moins de souci à se faire, car nous sommes dans une République qui se veut respectueuse de toutes les croyances et surtout qui offre un cadre propice qui permet toutes les convictions. Mais, il parait inquiétant le caractère contraignant que certains religieux, notamment musulmans veulent imposer aux autres, telle que la tenue vestimentaire, la manière de vivre très arabisée ! Alors que la Guinée a toujours un havre de paix, de cohabitation de différents groupes ethniques et religieux. Des pratique coutumières ont, pourtant souvent fait bon ménage avec l’islam et les lois de la République, il se trouve de nos jours dans certains milieux que ce droit commun est soit interdit ou relégué au second plan au profit d’un droit musulman plutôt idéaliste que réaliste et surtout injustement galvaudé et trahi le sens de son esprit.
Ayant moi-même fait une étude pratique sur les réseaux sociaux à travers des petits questionnaires telle que : Que inspire pour vous la Charia, la fatwa, le mariage religieux prime-t-il sur celui civil et en cas de divorce le seul jugement d’un juge de la République peut-t-il mettre fin à ce type de mariage ou faut-t-il que les tribunaux Chariatiques se prononcent à leur tour, doit-on souhaiter a ses amis non musulmans de passer une joyeuse fête ? Est-t-il interdit par l’islam de présenter des condoléances aux musulmans ? Ou encore, pourquoi l’islam interdit-t-il le mariage d’une musulmane a un non musulman … ? Les réponses données par les internautes, la plupart guinéens étaient d’une méconnaissance absolue de la plus basique des droits religieux, et plus inquiétant encore, le mélange du droit coutumier à celui de la loi musulmane par la plupart !
Il est clair que l’Islam enseigné par nos grands-parents à la base est en parfaite harmonie avec la foi et nos coutumes.
L’organisation de la famille dans la Loi :
En Guinée, si le droit écrit est le seul qui soit reconnu officiellement, l’utilisation dans certaines régions du droit coutumier du droit religieux crée une confusion qui nuit au respect des droits des femmes bien que le droit écrit soit officiellement le seul reconnu. Les projets de Code des personnes et de la famille, et de Code de l’enfant et la révision du Code civil en cours de préparation ou d’examen depuis plusieurs années, n’ont toujours pas été adoptés. Les textes en vigueur, en particulier le Code civil, contiennent de nombreuses dispositions discriminatoires, notamment :
– Age légal du mariage (art. 280): il est de 17 ans pour les femmes et 18 pour les hommes, le procureur de la République pouvant accorder des dispenses d’âge sous certaines conditions.
– Autorité familiale (art. 324): “le mari est le chef de famille”. De ce fait, le choix de la résidence lui appartient (art. 247 et 331) et il peut s’opposer à ce que son épouse exerce la profession de son choix (art. 328). En cas de divorce, la femme ne pourra obtenir la garde des enfants que jusqu’à l’âge de 7 ans (art. 359).
– Adultère : est considéré comme un motif de divorce s’il est commis par l’épouse.
Pour le mari, il ne sera considéré comme motif de divorce que si l’époux a “entretenu sa concubine au domicile conjugal” (art. 341 et 342).
La reconnaissance juridique du mariage religieux :
Dans le droit privé guinéen[9], la reconnaissance juridique du mariage religieux évitera des conflits entre les coutumes et traditions, car, aucun nombre de doute sur la force de ces lois religieuses dans le cœur de la très grande majorité de la population et la loi civile ayant également force de loi dans les esprits. Ceci dit, pour faciliter une meilleure cohabitation entre les deux lois (divine et droit commun), sans que cela n’affecte la neutralité de l’Etat dans le cadre de la laïcité, les démarches suivantes sont nécessaires d’autant plus qu’il va de la survie des liens de mariages déjà ficelés :
- Reconnaitre le mariage religieux, c’est réconcilier les différentes sources de droit en Guinée : notre société a ses propres particularités qui la différencient des autres sociétés notamment occidentales, et toute règle de droit se voulant efficace en Guinée ne saurait faire abstraction de ces particularités. Dans le cas contraire, c’est la légitimité elle-même de la loi civile qui pourrait être remise en cause dès lors que sa substance est en décalage total avec les réalités. Cette réalité, c’est rappeler que la religion occupe une place primordiale dans l’esprit et le cœur des guinéens et faire fi de cette réalité, c’est fonder la société sur des bases fragiles.
- Reconnaitre le mariage religieux, c’est sécuriser la très grande majorité des unions déjà enregistrées dans les registres de l’état civil et celles qui vont l’être dans les mois à venir : selon l’article 202 du code civil guinéen, le mariage civil doit précéder obligatoirement le mariage religieux sous peine d’emprisonnement d’une durée de 3 mois à 1 an. Par ailleurs, l’article 306 du même code dispose que toute personne intéressée, y compris les époux eux-mêmes, peut contester la légalité d’un mariage qui n’est pas célébré devant l’autorité civile. En clair, cela veut dire que le mariage doit d’abord être célébré à la mairie avant de l’être à la mosquée ou à l’église. Or, il est de notoriété publique qu’en Guinée, les mariages sont d’abord célébrés à la mosquée avant de l’être chez le maire pour ceux qui font le choix d’y aller, et ce, au vu et au su des autorités elles-mêmes qui se soumettent à cette règle. Alors comment expliquer un tel décalage entre la loi et la réalité si le législateur ne se saisit pas de la question pour conférer un statut juridique à l’union religieuse ? Cela n’aurait aucun sens d’entretenir cette insécurité qui, faut-il le dire, est dangereuse tant d’un point de vue religieux que juridique. Sur le plan religieux, on pourrait s’interroger, par exemple, sur la possibilité de réconcilier les conditions de validité du mariage religieux et celles du mariage civil de telle sorte que ce dernier puisse être légitime devant l’autorité religieuse. Sur le plan juridique, les interrogations sont encore plus nombreuses: – le flou absolu quant aux droits et devoirs des époux seulement mariés devant l’imam – quel traitement appliquer par rapport à la légitimité et droits des enfants issus d’une telle union, notamment en matière de succession? – quel serait le sort des biens acquis ensemble pendant le mariage ?
- Reconnaitre le mariage religieux, c’est restaurer l’autorité de l’Etat : comme souligné précédemment, en Guinée, les mariages sont d’abord religieux avant d’être civils et ce, au vu et au su des autorités elles-mêmes qui se soumettent à cette règle pour ce qui concerne leurs propres familles. Restaurer l’autorité de l’Etat, c’est faire en sorte de ne pas rendre l’Etat impuissant, voire complice des situations de flagrants délits de mariage illégal. En outre, l’absence de reconnaissance juridique implique l’irrecevabilité d’une éventuelle demande en justice formulée par l’un des époux pour contribution aux charges du ménage par exemple. Or, dans pareille circonstance, il est évident que les parties se réorienteront vers la cellule familiale. Conférer ainsi un statut juridique au mariage religieux permettra d’éviter une situation dans laquelle la Famille viendrait en concurrence directe avec l’autorité publique compétente en la matière sur un sujet tout aussi fondamental.
Dans la pratique, outre ces conflits qui peuvent survenir entre les droits (coutumier/religieux et le droit commun), il y a un autre souci plus sérieux. Il s’agit bien de la discrimination dans la famille :
Les mariages précoces et forcés demeurent répandus dans la plupart des groupes ethniques et religieux du pays, favorisés par la pression sociale et économique.
En 2005, les Nations unies estimaient que 46% des filles entre 15 et 19 ans étaient mariées, divorcées ou veuves. Concernant la polygamie, si elle est explicitement interdite par le Code civil (art. 315), il est cependant estimé qu’environ la moitié des femmes guinéennes sont concernées.
D’ailleurs l’ancien Président de la République en était conscient de cette situation préoccupante, n’a pas manqué d’appelé les principaux instigateurs de s’impliquer davantage dans la lutte contre ce fléau en Guinée : « Vous devez tous lutter contre les mariages précoces, de violences faites aux femmes, la consommation de la drogue par les sermons dans les mosquées et être vigilants pour lutter contre le terrorisme et l’extrémisme religieux qui menacent les pays du monde. Soyons vigilants[10]».
L’excision est illégale depuis 2000 mais particulièrement ancrée dans les pratiques traditionnelles, elle reste pratiquée dans toutes les régions, quel que soit leur niveau de développement socioéconomique. Les auteurs de mutilations génitales féminines (MGF) ne sont jamais sanctionnés. En 2005, il a été estimé que 96 % des femmes et des jeunes filles ont subi une forme de MGF. Et généralement, l’argument religieux est de mise[11].
Et pourtant, la Guinée dans son écrasante majorité réserve une place de choix aux femmes, d’ailleurs, elle fait partie des 3 piliers de la société dans certaines communautés, notamment celle des Peuls, au côté du Coran et de la vache. Ceci prouve à suffisance la place importante que nous réservons à la femme dans notre culture.
Nous avons le souci qu’il n’y ait pas de dérive dans cette religion, comme cela est malheureusement le cas dans certains pays aujourd’hui. Le fanatisme est un islam idéologique qui se propage de nos jours grâce à des financements et manipulations de certains réseaux arabo-perses. En Guinée, les activistes de ce fanatisme dangereux viennent des pays voisins.
On a eu des érudits comme El-Hadj Oumar Tall, Alpha Yaya Diallo, des Almamy Boubacar Biro, Almamy Samory Touré, Alpha Ibrahima Sambéguou dont la foi musulmane a rayonné jusqu’en Arabie. Mais les nouveaux apôtres du wahhabisme laissent même entendre que les noms Boubacar, Biro ou Ibrahima ne sont pas musulmans. Ils préconisent « Abou Bakr » à la place de « Boubacar » par exemple. Ce qui montre clairement que de nos jours, c’est l’arabisme qu’on est en train d’enseigner et non l’Islam.
En revanche, il y a plusieurs pratiques considérées du lot du fanatisme, en réalité n’est qu’une forme d’extrémisme dans le refus d’accepter le choix de l’autre dans l’exercice de son culte du moment où cet autre respecte à son tour les autres dans leur différence. Comme par exemple l’absence de musique lors du mariage des gens communément appelé « Wahhabites » encore moins de danse, et en cas de décès, pas de pleures. Si nous revenons à la source de ces comportements, nous trouveront qu’il y a bel et bien des justificatifs tirés des enseignements du prophète de l’islam qui prohibait dans l’un des hadiths, la musique, et déconseillait le fait de pleurer (regretter) un mort au lieu de prier en place pour lui. Et aussi l’interdiction de célébrer l’anniversaire (Mawlid) du prophète Muhammad (Paix et bénédiction de Dieu sur Lui).
Ces avis ne devraient pas faire en principe l’objet de discorde dans une communauté considérée pacifique jusque-là. Car, il révèle des sujets de divergence entre les jurisconsultes, or, la règle juridique voudrait bien que dans ce genre de situation, le respect de tous les avis juridique doit prévaloir, puisque chacun a ses preuves sur lesquelles il s’appuie dans sa pratique religieuse. Concernant le Mawlid par exemple, il est avéré que le Prophète est né et décédé à la même date, le bon sens voudrait de se demander ce que l’on devrait célébrer, Sa naissance ou bien sa mort ?
Le problème que beaucoup ne comprennent pas est que même si l’Islam recommandait quelque chose, Il s’adresse à l’individu en tant que croyant et chacun est responsable pour soi et soi seul. Personne ne doit imposer sa foi aux autres. Le Prophète ne l’a pas fait à son épouse Rayhana qui était juive ni à Maria qui était Copte. En Iran, l’alcool est interdit aux musulman mais autorisé aux non musulmans en vertu de la loi religieuse qu’ils appliquent.
« S’habiller décemment est recommandé mais le voile n’est évoqué qu’en tant que Hijab et recommandé aux musulmanes de la même manière qu’il est recommandé aux musulmans de saluer et partager son repas avec les autres. Aucune sanction n’a été prévue ou prononcée ici pour ceux qui ne le font pas. Il est bien de le faire mais « aucune griffe sur celui ou celle qui ne le fait pas ». Le Coran me donne même le droit de ne pas être musulman: j’en ai le libre choix. Pourquoi donc embêter les gens parce qu’ils ne s’habillent pas ou n’agissent pas comme soi? Si le Prophète aimait la barbe, moi je ne l’aime pas. Si le prophète a épousé plusieurs femmes, certainement un caractéristique propre à lui, moi je ne le veux pas. Il était un homme et une personne qui a ses goûts et ses préférences et moi j’ai les miennes. Il avait toujours préféré couper son carême avec des dattes mais moi je préfère des mets locaux du pays. Alors qu’on ne me demande pas de faire comme lui sur le plan humain ou culturel. Si lui avait eu ce comportement de ces wahhabites de nos jours, l’Islam n’aurait pas évolué à son temps. Il a fait des Djihads contre ceux qui voulaient l’éliminer et qui combattaient l’Islam et non pour imposer sa religion à quiconque.
Je suis musulman mais Guinéen : pas question de porter des pantalons insuffisants, des voiles arabes qui sont d’ailleurs antérieurs à l’Islam ou une barbe arabe. Les habits guinéens sont décents et en parfaite harmonie avec la religion de Mohammad (paix et salut sur lui) ». S’écrie Monsieur Sadio Barry, un internaute guinéen suite à un débat religieux sur internet. Par contre, d’autres avaient des positons qui abondaient dans le sens du strict respect des enseignements coraniques et prophétiques.
L’un des rôles qui fait partie de l’organisation de la religion en Guinée, est l’implication des chefs religieux pour le maintien de la quiétude sociale.
Ces guides spirituels sont en quelque sorte, les garants de stabilité sociale en Guinée. La Guinée est un pays où les manifestations à caractère politique minent tout le temps la paix sociale, c’est pourquoi, le Secrétariat Général aux affaires religieuses et le grand imam de la mosquée Fayçal sont tout le temps saisi, non seulement par les politiciens du pays mais aussi par les organisations de maintien de paix dans le monde, car très écouter par une population profondément ancrée dans les valeurs morales et de paix prônées par ces religions (Islam et Christianisme). Leur appellent au calme lors des manifestations sont diffuser a grand échelle.
Dans le climat de tension intercommunautaire et de risque que des violences liées aux élections puissent assumer des connotations ethniques ou même religieuses, les Autorités religieuses du pays à tous les niveaux parlent très souvent à leurs communautés pour nier toute légitimité à la violence, au nom des valeurs les plus sacrés. Un exemple de ces appels au calme qui ont été relayé par la Radio France Internationale RFI, l’appel du grand imam de la grande Mosquée Fayçal de Conakry Elhadj Mamadou Saliou Camara, lors des élections législatives de septembre 2013 : « Nous, musulmans et les chrétiens, tous les chefs religieux demandent au peuple de faire son devoir patriotique sans violence. Par la violence, on ne peut rien faire. Sans violence on peut tout faire petit à petit ».
Même son de cloche de la part de Monseigneur Vincent Coulibaly, l’archevêque de Conakry : « Il faut que le Guinéen se ressaisisse, il faut qu’il pense à son pays, qu’il pense à l’avenir. Donc je souhaite la paix. A travers notre pays, il y a de la manipulation de la part des politiciens et d’autres personnes cherchant leur intérêt. Cela aussi compromet la paix. Aujourd’hui, à la veille, je prie pour que Dieu donne la sagesse aux Guinéens [12]».
La Guinée est un pays où tout manque[13], un département ministériel comme le Secrétariat Général aux affaires religieuses ne se penche sur le recensement des mosquées et églises de la Guinée qu’en novembre 2016, alors même que ce département existe depuis des décennies, dans ce bref déclaration du Secrétaire Général aux affaires religieuses, nous pouvons lire : « Nous avons informé tous les fidèles musulmans et chrétiens de la République de Guinée que dans une semaine il y aura le recensement général des mosquées, des églises et des lieux de cultes. Un recensement qui va commencer dans les Cinq (5) communes de la Capitale avant d’aller à l’intérieur »
Plus étonnant encore, c’est l’absence de cadre juridique qui nomme les ministres de cultes à ces responsabilités religieuses. Selon Monsieur le Secrétaire général, l’objectif de ce recensement est de savoir effectivement combien de mosquées et églises compte notre pays. Quels sont les imams qui dirigent les prières de vendredi, quels sont les actes les nommant à ces responsabilités[14] …
Il faut juste rappeler que ce Secrétariat est chargé des affaires religieuses (musulmane « la ligue islamique » et chrétienne). Il y a des associations culturelles et cultuelles qui se prolifèrent un peu partout dans le pays. Aux côtés de ces organisations sociales à caractère religieux, il y a plusieurs autres partenaires religieux qui exercent à l’échelle internationale, comme le Corps du Secours Internationale Islamique basé en Arabie Saoudite. Il est judicieux de mettre un accent particulier sur le financement extérieur que certaines associations reçoivent des monarchies Pétrodollars du Golfe. Il se trouve aussi que certains étudiants ayant fait des études dans ces pays perçoivent de l’argent de ces pays suivant des programmes spécifiques à chaque Etat, ces aides extérieures viennent principalement de la Libye et de l’Arabie Saoudite.
De l’autre côté, il y a plusieurs organisation Catholique qui œuvrent dans le domaine de la paix, de la santé (avec le volet spécifique sur le VIH/SIDA), de l’Agriculture, de l’eau et assainissement, de l’éducation, du microcrédit et la promotion de la petite entreprise, de la protection, des services sociaux et de l’édification de la paix et la gouvernance. On peut en citer à titre d’exemple : Catholic Relief Service (CRS[15]), le Réseau national de Justice et Paix de l’Eglise Catholique de Guinée (J&P[16]), la Communauté de Sant’Egidio[17] (qui se proposent d’offrir un appui technique et organisationnel aux principaux leaders religieux chrétiens et musulmans, afin de rendre audibles et visibles une série de messages et actions conjointes visant à promouvoir une culture de paix et respect mutuel). Search for Common Ground[18]. Organisation Catholique pour la Promotion Humaine (OCPH)[19] Subdivisé en trois diocèses -Conakry, Kankan et N’Zérékoré – l’Eglise en Guinée ne représente que les 10 % de la population guinéenne.
La Situation religieuse et le Cadre juridique de la liberté de religion et son application effective[20] :
La Constitution de 1990 reconnaît la liberté religieuse et garantit, à l’article 14, l’autonomie et l’auto-organisation totale des institutions et communautés religieuses. Un Secrétariat général pour les Affaires Religieuses a été créé en mars 2007, avec des représentants des deux religions, afin de faire participer aussi bien les musulmans – qui représentent la majorité de la population – que les chrétiens aux décisions d’importance nationale.
Les lois du pays garantissent une grande liberté religieuse, telle que le droit de choisir librement sa religion et de se convertir à une autre religion. La Guinée est un pays de grande diversité ethnique et religieuse, et dans la pratique, ces droits sont généralement observés sans restrictions majeures – même si l’attitude du gouvernement envers les différents groupes religieux montre des tendances fortement autoritaires. Ainsi l’islam a toujours montré une attitude relativement modérée envers les autres religions. Un Conseil interreligieux travaille en étroite collaboration avec le gouvernement dans le domaine des affaires religieuses. Au cours de la période en question, des religieux non musulmans ont signalé un traitement préférentiel accordé aux musulmans par les institutions de l’État. Toutefois, aucun exemple concret n’a été cité.
Conformément à la loi, le Secrétariat général des Affaires religieuses doit approuver tous les groupes religieux[21]. Les groupes sont tenus de fournir copie de leurs statuts constitutifs, de soumettre au Secrétariat une demande indiquant leur adresse et de verser une redevance de 250 000 francs guinéens (35 dollars É.-U.).
Le Secrétariat général transmet les documents au ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation (équivalent du ministère de l’Intérieur en France) pour approbation finale et signature. Une fois approuvé, le groupe devient une religion officiellement reconnue. Et chaque groupe officiellement reconnu doit fournir un rapport sur ses activités tous les six mois. L’enregistrement donne aux communautés le droit à des exonérations fiscales et à des subventions dans le domaine de l’énergie. On ne signale pas de difficultés majeures à cet égard au cours de la période en question.
Les groupes religieux ne sont pas autorisés à posséder des stations de radio ou de télévision. Cependant, ils peuvent diffuser des émissions religieuses sur les chaînes de télévision commerciales. Par l’entremise du SGRA, du temps d’antenne gratuit est attribué aux différentes communautés religieuses sur la télévision d’État. En effet, la télévision publique accorde un espace de 75 minutes chaque semaine pour des émissions musulmanes ou chrétiennes. Cela inclut la présentation en rotation de la
prière musulmane du vendredi, l’enseignement de la foi islamique et la liturgie chrétienne du dimanche.
Les imams et le personnel administratif de la grande mosquée de Conakry et des grandes mosquées des principales villes des quatre régions sont des fonctionnaires de l’État. Ces mosquées relèvent directement de l’administration gouvernementale. Les autres mosquées bénéficient de subventions de l’État.
Le SGRA a des inspecteurs dans toutes les régions du pays, dont la tâche est de superviser le culte et la prédication. Leur mandat couvre toutes les religions. Le SGRA fournit également des sujets hebdomadaires pour la prédication et évalue si les communautés religieuses s’y conforment.
Le secrétaire général des Affaires religieuses nomme six directeurs nationaux chargés respectivement des bureaux des affaires chrétiennes, des affaires islamiques, des pèlerinages, des lieux du culte, des affaires économiques et des fondations, ainsi qu’un inspecteur général. Le Secrétariat général est chargé de promouvoir les bonnes relations entre les divers groupes religieux et il coordonne ses actions avec celles d’autres membres du Conseil interreligieux, au sein duquel sont représentés la plupart des groupes religieux (à l’exception des Témoins de Jéhovah qui ont choisi de ne pas en être membres), ainsi que le Secrétariat général lui-même.
Les écoles privées et religieuses sont autorisées, sous le contrôle du ministère de l’éducation qui doit garantir le respect des normes nationales. Les écoles chrétiennes, qu’elles soient catholiques ou protestantes, sont nombreuses. Les medersas (écoles musulmanes), souvent dirigées par des groupes islamiques radicaux, et financées par des fonds étrangers arabo-perses, ne sont généralement pas insérées dans le système scolaire public, mais quelques-unes offrent un programme adéquat pour l’enseignement primaire.
Situation du respect de la liberté de religion par la société :
Dans certaines régions du pays, de fortes pressions familiales, communautaires, culturelles, sociales ou économiques dissuadaient les gens de se convertir à une religion autre que l’islam. Les médias ont signalé régulièrement des incidents et des réactions sociétales opposées à ces conversions. Par exemple, un imam de la ville de Forécariah a tenté de brûler vif son fils qui s’était converti au christianisme. Ce dernier a été sauvé et a trouvé refuge au sein de la communauté chrétienne. Le Secrétariat général des Affaires religieuses a également indiqué que la conversion de musulmans, et tout particulièrement de femmes, à une autre religion donnait lieu parfois à une rejection ou à des persécutions de la part des familles et des communautés.
Il a été signalé des différends entre communautés musulmanes. Le Secrétariat général des Affaires religieuses et le Conseil islamique, par exemple, sont intervenus en tant que médiateurs dans un différend qui opposait de longue date des musulmans tidjanes et des wahhabites concernant l’accès à une mosquée de Labé.
Perspectives pour la liberté de religion :
Malgré les controverses politiques et d’autres enjeux qui affligent le pays, les perspectives de la liberté religieuse apparaissent grosso modo bonnes. La décision du SGRA de soutenir les pèlerinages des citoyens non-musulmans semble indiquer la parité croissante entre groupes religieux[22].
Dr. Mohamed Bintou Keita
Islamologie : Religion, droit et société.
Université de Strasbourg/France
………………………………………………………………………..
-
[1] Les articles de la a Constitution du 7 mai 2010.
[2] Rencontre tenue en mai 2016 à Conakry. [3] Histoire de la Guinée, Source : Luc MOGENET. http://kababachir.com/histoire-de-la-guinee/
[4] 12,6 millions d’habitants (Banque mondiale, 2015).
[5] Banque mondiale, 2015.
[6] Voir : (Europa 2004 2004, 1949; International Religious Freedom Report 2004, sept. 2004, sect. I)
[7] L’animisme se définit donc surtout comme la conception métaphysico-religieuse qui introduit une multiplicité d’êtres, construits sur le prototype de l’âme humaine, comme intermédiaires entre Dieu et l’homme génies créés, invisibles mais revêtant parfois des formes matérielles êtres puissants mais vaincus à l’occasion, par des forces compensatoires action d’un fétiche, prière d’un féticheur, magie d’un génie concurrent. Sous l’angle métaphysique, l’animisme signifie l’omniprésence des âmes ; sous l’angle psychologique, il symbolise une affectivité qui essaie de se dépasser par la justification. L’inventaire exhaustif et la classification logique de ses manifestations à l’intérieur de chaque ethnie sont rendus quasi impossibles par l’étonnant ésotérisme des mythes, l’insuffisante analyse de l’activité culturelle, la multiplicité des symboles mythologiques et l’encombrement des réponses d’informateurs par une imagerie plus ou moins fabuleuse. Voir l’article de Claude Rivière sur : Fétichisme et démystification. L’exemple guinéen : www.webguinee.net consulté le 13/04/2017.
[8] L’intégrisme guetterait-il la Guinée ? Ahmadou 1 Diallo & Sadio Barry pour le site d’information en ligne http://www.guineepresse.info/
[9] Voir : La Revue de Droit Privé Guinéen www.juriguinee.org consulté le 13/04/2017.
[10] Discours lors de la 4ieme conférence islamique ; mai 2016.
[11] http://www.africa4womensrights.org/public/Cahier_d_exigences/Guine_ue-Conakry-FR.pdf
[12] http://www.rfi.fr/afrique/20130927-elections-guinee-religieux-appellent-calme consulté le 1/05/2017.
[13] Le seul rapport sérieux dans ce domaine est celui mené par l’ambassade des Etats-Unis en 2014.
[14] Rapporte le quotidien www.guinee24.com du 8 novembre 2016.
[18] SFCG est une organisation non gouvernementale internationale qui a pour mission de transformer la manière dont le monde gère les conflits en écartant l’approche de confrontation et en privilégiant la recherche de solution par la coopération. : www.sfcg.org ce dernier n’est pas une organisation religieuse proprement dite, cependant, il apporte des appuis aux guides religieux et la société civile qui œuvrent dans le domaine de la recherche de solution commune pour la paix.
[19] L’OCPH/ a été créée le 7 Mars 1986 et reconnue le 10 Mars 1993 par le gouvernement guinéen comme une ONG à caractère religieux, apolitique et à but non lucratif. Voir : http://www.caritas.org/fr/ou-nous-trouver/afrique/guinee/ Consulté le 05/05/2017.
[20] International Religious Freedom Report for 2014.
[21] Monique Mullenaux Laing, Encyclopedia of Law and Religions, volume 1 Africa. Guinea p. 134-137.
[22] L’Observatoire de la liberté religieuse. http://www.liberte-religieuse.org/guinee-conakry/