Pr Fatoumata Binta Diallo s’est exprimée ce mardi sur l’affaire d’eau empoisonnée lors de la présidentielle de 2010 en Guinée. Directrice générale de l’hôpital Ignace Deen à l’époque, elle brise le silence, 11 ans après le prétendu empoisonnement d’une eau minérale. D’ailleurs c’est cette histoire qui lui a coûté son poste à la tête de cet hôpital.
Invitée chez nos confrères de la radio espace Fm, elle évoque un rôle joué par l’ancien président Alpha Condé et le Premier ministre de la transition de 2010, Jean Marie Doré. A ses dires, tout est parti d’un meeting animé par le président du RPG. C’est de là que des choses confuses ont commencé à fuiter.
« C’était le vendredi 22 octobre après un meeting du Pr Alpha Condé. Le service des urgences m’appelle pour me dire qu’ils ont reçu une dizaine de patients dans état de malaise dont certains s’évanouissent. J’ai essayé d’appeler mon adjoint, je n’ai pas pu. Du coup, je reçois un autre coup de fil pour me dire madame la Directrice il y a eu combien de corps ? Immédiatement je me suis levée, malgré mon état de santé, j’ai dit à la personne qui m’a appelé de me donner 10 minutes, après je vais lui revenir. J’ai foncé à l’hôpital et je suis allée directement à la Morgue. Il n’y avait pas de dépôts de corps, je suis venue au service des urgences, j’ai trouvé près d’une vingtaine de patients qui étaient couchés à même le sol. C’est en ce moment que des journalistes sont venus me demander il ya eu combien de dépôts de corps ? Je leur ai dit qu’il n’ya pas de dépôts de corps. Plutôt nous avons reçu des patients avec des maux de ventre », relate t-elle, avant d’annoncer Alpha Condé dans la danse.
« J’avais dit qu’il fallait attendre les conclusions d’un rapport pour confirmer ou infirmer un empoisonnement. Après le Pr Alpha Condé a dit qu’il vient voir les patients empoisonnés et hospitalisés. J’ai demandé à chaque chef de service de se mettre avec le Pr Alpha Condé. Nous avons fait le tour des patients. Des femmes de Conakry 1 s’étaient introduites dans l’hôpital. Deux d’elles se sont mises devant moi, je les ai entendu dire que c’est moi la Directrice, que c’est moi qui ai dit que leurs enfants ne sont pas malades mais qu’ils ont faim. Du coups, elles m’ont proféré des injures, administré des coups, elles m’ont cassé deux côtes. J’ai été nommée par décret, mais révoquée par arrêté. Donc il ya eu cet acte qui me révoquait. C’est à la radio j’ai appris mon remplacement par mon adjoint. C’est feu Jean Marie Doré qui m’avait révoqué. Après avoir adressé un courrier à la présidence, j’ai été remise en service par un nouveau décret jusqu’au second tour de la présidentielle. Toutes les dispositions ont été prises pour que les choses se passent bien. Après l’investiture du Président, le tout premier décret qui devrait nommer le gouvernement, est tombé sur moi pour me limoger et remplacer par Dr Awada, il est Docteur et moi je suis professeure titulaire, c’est le dernier grade. Le décret qui devrait nommer les ministres, c’est là que Fatoumata Binta Diallo se retrouve », poursuit Pr Fatoumata Binta Diallo.
A la question de savoir s’il y a eu des morts ou pas, elle répond par la négation. Elle dit avoir refusé l’exigence faite par les autorités d’alors, qui voulaient lui faire confirmer des décès qui n’ont pas existé.
« Aujourd’hui on peut en parler. Les jeunes qui sont allés en tant que patients, l’un d’eux est allé aux toilettes, il revient dire au médecin qu’il a vomis un crapeau. Il y a eu des charlatans qui étaient venus dans l’hôpital pour s’occuper de ces enfants. En ce moment, je m’occupais de mes cottes cassées. Mais si j’affrimais qu’il ya eu empoisonnement, j’aurais été ministre. On voulait que j’affirme qu’il ya eu des morts par empoisonnement. Mais moi j’ai refusé de dire qu’il ya eu des morts, parce que j’ai pensé à la République. Si je disais qu’il ya eu empoisonnement, il y aurait une guerre civile. Il faut dire clairement qu’il n’y a pas eu empoisonnement », confie l’ancienne Directrice de l’hôpital.
Siradio Kaalan Diallo