Tierno Monénembo que nous avons admiré et que nous continuons d’admirer à travers ses oeuvres littéraires est une icône mondiale. Il a eu droit à tous les honneurs, un peu partout à travers le monde. Il est actuellement l’un des plus grands écrivains francophones. Depuis les années 60, l’homme n’a cessé de donner son point de vue sur la vie sociale, politique, économique et culturelle de la Guinée.

Aucun régime n’a échappé à sa plume au vitriol. Il avait fui la Guinée sous la dictature de Sékou Touré. Un régime qui l’a sevré de sa patrie pendant plus de 26 ans. Il ne ratait aucune occasion de critiquer Sékou Touré. Même dans ses oeuvres, l’ombre du tyran apparaît.Il n’avait pas, non plus, épargné le régime de feu Général Lansana Conté. Idem pour les transitions pilotées par capitaine Moussa Dadis Camara et Général Sékouba Konaté. Et lorsqu’Alpha Condé vint au pouvoir en 2010, Monenembo n’avait pas tardé à s’opposer à l’ancien opposant historique.

Les mauvaises langues lui avaient affubler tous les qualificatifs, allant jusqu’à le ranger comme militant du parti UFDG. Malgré tout, l’homme est resté droit dans sa plume. Il s’est farouchement opposé au 3ème mandat d’Alpha Condé au risque de sa vie. Mais, Tierno qui avait connu l’exil avait déclaré à qui veut l’entendre qu’il n’allait plus jamais fuir la Guinée à cause d’une dictature.

L’intellectuel, dans le vrai sens que lui donnait Zola ( qui avait défendu Dreyfus) est quelqu’un qui s’oppose à tout ce qui est anormal. Il s’oppose à tout ce qu’il considère comme injustice. Il ne cherche pas à plaire aux potentats. Tierno est de cette trempe-là. Il avait refusé d’être autour de la même table que François Hollande ( là où plusieurs Chefs d’États Africains se seraient agenouillés pour manger avec ceux qui mangent l’Afrique).

Ce n’est donc pas hier que l’écrivain a commencé à s’opposer aux dérives dictatoriales en Guinée. Pour ceux qui connaissent Monénembo, il ne pouvait donc pas ne pas condamner l’acte du Colonel Mamadi Doumbouya qui a rebaptisé l’aéroport de Conakry Gbessia du nom de feu Ahmed Sekou Touré. Lisez ce qu’il a dit :

« Cet acte (décret du colonel Mamadi Doumbouya relatif au changement de nom de l’aéroport) est complètement illégal. Le colonel Doumbouya n’a aucun pouvoir, aucune légalité, aucune légitimité de baptiser ou débaptiser des lieux publics de la Guinée. Colonel Doumbouya n’est pas un président de la république, c’est un putschiste. Il est là de fait qu’il nous a débarrassé du régime néfaste d’Alpha Condé. On l’a applaudi pour cela. Il n’a aucune légitimité, il n’est pas président de la république de Guinée. Il n’a rien à décréter. Le colonel Doumbouya est dans l’illégalité la plus totale. Son acte est plus illégal que le 3è mandat d’Alpha Condé. Dans un pays normal, il serait immédiatement destitué et foutu en prison.La Guinée n’est pas normale. Il faut la rendre normale par le combat. Il faut se battre pour ne plus subir. Il faut que les démocrates de ce pays se lèvent et se battent contre tous ces gens qui considèrent la Guinée comme leur propriété privée. Ce combat doit être mené quelque soit le prix. La liberté a un coût et il faut le payer pour que les guinéens sortent de la léthargie, de la résignation. Ayons du courage. Affrontons les barbares. On ne discute pas avec les barbares, on les combat. Et ce combat doit commencer dès maintenant. Vous avez parlé de procédure judiciaire. Cette procédure judiciaire doit commencer maintenant, à cette minute là, à cette heure là. Il faut que dans la semaine, il y ait quelque chose de concret dans les tribunaux de la Guinée, de la CEDEAO ou ailleurs ».

Je suis donc révolté. Comment peut-on insulter Tierno Monénembo pour avoir dit ce qu’il pense ? Donc, vous souhaiteriez que tout le monde soit du même avis à propos des actes posés par le Colonel Doumbouya et le CNRD ? L’époque de la pensée unique du seul maître à penser est révolue. Nous ne serons jamais tous du même avis.

Pour paraphraser l’autre, ne soyez pas d’accord avec ce que Monénembo dit, mais battez-vous au moins jusqu’au bout pour qu’il puisse avoir la liberté d’exprimer ses opinions sur la vie sociale, politique, économique et culturelle de la Guinée.

AZOCA BAH