Le président du TPI de Kaloum a pris une ordonnance aux termes de laquelle l’Etat a attenté à la présomption d’innocence de Djoma et par conséquent est condamné à publier ladite ordonnance dans 3 médias majeurs.

Trois points de cette décision ont particulièrement attiré mon attention.

Le premier porte sur la question de la personnalité morale du ministère de la justice soulevée à tort par l’agent judiciaire de l’Etat. Pour obtenir la fin du procès in limine litis, l’AJE a cru devoir rappeler que le ministère de la justice n’a pas de personnalité morale et qu’il ne peut donc pas être attrait en justice. L’argument est maladroit puisque c’est l’Etat qui est poursuivi. Ce que le juge va rappeler avec malheureusement de mauvais arguments. Le Ministère n’est pas comparable à une succursale et le ministère n’est pas un démembrement de l’Etat.

Le Ministre (et non le Ministère ) est un représentant légal de l’Etat dans la limite de ses attributions. C’est donc lui qui représente l’Etat et non le Ministère (qui est juste un ensemble de services).

Le second point porte sur la question de l’application de l’article 44 du Code civil aux personnes morales. C’est une question qui aurait mérité une vraie argumentation parce que la structure du Code civil laisse penser que cette disposition s’applique aux seules personnes physiques. Djoma SA étant une personne morale, cette dernière aurait pu expliquer pourquoi elle estime que son droit à la présomption d’innocence mérite d’être protégé sur cette base. Malheureusement le juge lui-même ne s’est pas posé la question.

Le troisième point porte sur la question du recours au droit comparé. Dans les moyens qu’elle a présenté, Djoma a rappelé que l’article 44 du Code civil guinéen est d’inspiration française et que son interprétation peut aussi s’inspirer du droit français. C’est une position que nous partageons. Chaque système juridique appartient à une famille. Les juristes d’une même famille de droits ont besoin de dialoguer afin de combler les lacunes de leurs systèmes respectifs.

Par Sekou Oumar Camara