Toutes les sociétés et civilisations humaines qui se sont développées au cours de l’histoire sont parvenues à le faire par le biais de la connaissance acquise. C’est à juste titre que le diplomate et homme d’État Kofi Annan disait : « l’éducation est la prémisse du progrès dans chaque société ».  

Ainsi, il ressort d’une observation poussée de la société guinéenne que cette dernière regorge indéniablement d’une belle et intelligente couche juvénile dont le potentiel peine à être exploité, une jeunesse pourtant héritière de valeurs socio culturelles qu’elle a acquises par le truchement d’une transmission de génération en génération.

Cependant, depuis l’avènement des indépendances, au lieu d’une consolidation et d’un renforcement de cette richesse culturelle, on assiste impuissamment à son effritement graduel au profit d’une acculturation et d’un déracinement sur fond de problèmes structurels. 

Pourtant, il s’avère évident que si nous aspirions à uncapital humain qui soit à la hauteur de nos attentes tant sur le plan de la productivité que sur celui de la probité morale, il nous faut une refonte des programmes de formation au primaire et au secondaire en favorisant « l’intégration de la dimension culturelle » dansl’enseignement et l’apprentissage.  

En effet, intégrer « la dimension culturelle » dans l’apprentissage et l’enseignement en Guinée a plusieurs atouts pour nos élèves et étudiants en ce sens où cetteintégration leur permettra d’atteindre ces objectifs suivants:

Accéder à un héritage culturel duquel ilss’approprieront plus tard dans leur vie professionnelle à travers l’apprentissage de grandes œuvres et des réalisations du passé.
Devenir des personnes très cultivées.  
Acquérir des aptitudes /compétences en profitant denotre héritage socio culturel, en se l’appropriant et en l’enrichissant par leur rôle actif dans le processus du développement de notre pays.
S’engager dans la société, avec un esprit imprégné de fortes valeurs dont l’intégrité morale, la tolérance, l’acceptation de la diversité sous toutes ses formes.

C’est donc pourquoi le diagnostic et le renforcement denotre système éducatif deviennent  une nécessité de plus en plus évidente afin que ce dernier soit enfin adapté aux nombreux et nouveaux enjeux du développement de notre pays. Il s’agit d’un processus obligatoire qui requiert que l’on initie les ETATS GENERAUX DE L’EDUCATION NATIONALE ET DE L’ALPHABETISATION afin de recueillir de riches contributions pour favoriser la réussite d’un nouveau pacte social autour des valeurs qui reflètent essentiellement nos réalités socio culturelles.

À cette fin, ces ETATS GENERAUX ne doivent pas être circonscrits qu’au ministère de l’Éducation mais plutôt ils doivent compter sur la coopération de plusieurs partenaires dont entre autres : le ministère des Sports,de la Culture et du Patrimoine historique, le Secrétariat Général des Affaires Religieuses, le ministère de l’information et de la communication, le ministère du Tourisme pour ne citer que ceux-ci.

A présent, il semble profitable à définir de manière pragmatique comment il peut être possible de mettre en exergue les manifestations de la culture dans le programme scolaire et dans chacune des disciplines en vue d’atteindre l’objectif visé.

Pour ce faire, les acteurs devront rechercher ce qu’on va appeler « des repères culturels » lesquels véhiculent des valeurs qui conditionneront les comportements, la personnalité de nos élèves et étudiants. Ces repères culturels selon leur nature apportent des réponses à des problèmes auxquels d’autres furent confrontés dans différents domaines de la vie à travers les âges.  

Ainsi, selon les activités d’apprentissage qui seront planifiées par les enseignants sous la supervision du ministère de l’éducation, l’exploitation de ces repèresculturels pourraient contribuer au développement personnel.

Cependant, pour réussir le pari de l’intégration de la « dimension culturelle », il faudra que les élèves puissent être bien outillés. Cela requiert un accompagnement de l’État et de nos partenaires au développement, dans la construction d’infrastructures et la mise à disposition de ressources nécessaires qui sont partie intégrante des stratégies d’enseignement. Il s’agit de trois types de ressources qui sont les suivantes :

1. Ressources humaines : Des enseignants bien forméssortis d’écoles d’instituteurs, la participation des membres de la famille de l’élève, aînés, membres de la communauté,
2. Ressources matérielles et techniques : livres (ouvrages littéraires liés aux repères culturels suivant leur nature), des ordinateurs pour les élèves (technologies de l’information et de la communication), etc
3. Ressources environnementales: la construction de bibliothèques dans les écoles, des galeries d’art et la mise en valeur des lieux historiques et musée

Une fois que ces ressources existeront, le choix se fera à la discrétion du personnel enseignant en fonction du niveau de classe, de celui du développement des élèves, des compétences visées, du type de tâche à accomplir, des repères culturels sélectionnés. Ainsi, nous verrons que grâce à la synergie de tous ces éléments constitutifssus mentionnés, notre programme de formation scolaire et académique reflètera nos réalités socio culturelles. Retenons qu’un apprentissage est considéré socialement significatif que lorsqu’ il met à la disposition de l’élève des outils pour mieux comprendre le monde social, culturel et physique dont il fait partie.

Par ailleurs, sachant bien que le programme privilégie une approche visant la compétence qui se définit comme « un savoir-agir fondé sur la mobilisation et l’utilisation efficaces d’un ensemble de ressources », le résultat sera que chaque matière apportera une contribution à la « formation culturelle » de l’élève.

Par exemple, l’introduction de la langue arabe comme matière à l’école guinéenne permettra à l’élève de se doter  d’un pouvoir intellectuel et culturel pour tirer profit de la bonne compréhension du Coran et son applicabilité dans la vie de tous les jours , des hadiths ( paroles et gestes du prophète , paix et saut sur lui ) et d’une multitude de ressources littéraires, documentaires et technologiques sur les grands scientifiques de l’âge d’or de l’islam dans les domaines de l’astronomie, de la médecine, de la géologie, de la chimie…

Aussi, un autre exemple serait l’introduction de l’enseignement moral et religieux qui permettra à l’élève guinéen d’avoir accès aux modes de vie, aux croyances, aux traditions, aux normes, aux valeurs et aux mœurs qui définissent notre identité. Aussi, ceci lui permettra de se choisir un repère ou modèle à suivre à travers l’histoire de personnages qui ont contribué à l’avancement de l’humanité, que ce soit par la promotion de valeurs ou la défense des droits. Tous ces outils permettront aux élèves de mieux construire leur personnalité en s’appropriant de leur propre culture. Ceci leur permettra de s’identifier crescendo à un système de valeurs tout en restant ouverts à la culture des autres.

Enfin, la refonte de notre système éducatif en intégrant la «  dimension culturelle » aura pour objectif ultime de nous approprier notre propre développement. Cependant, ce travail ne peut se faire sans prendre appui tant sur l’analyse de ces repères culturels que sur une pratique pédagogique qui vise à exploiter ceux-ci de façon cohérente et dynamique.

Par Abdoulaye M’Bemba KÉÏTA , Analyste.