Depuis la publication des conclusions du Rapport du cadre de dialogue inclusif et inter-guinéen auquel une frange importante des acteurs socio-politiques n’avait pas pris part, des commentaires vont tous azimuts concernant notamment la proposition de limitation d’âge à 75 ans pour être candidat à la présidentielle. Une proposition qui fait largement débat et éclipse une bonne partie des autres points contenus dans ce Rapport.

En effet, si pour d’aucuns, la limitation d’âge maximum pour être candidat à la présidentielle en Guinée est une très bonne idée pour élire un sang neuf aux destinées de notre patrimoine commun, pour d’autres par contre, ce serait une discrimination de l’âgisme.

Non seulement on n’a pas avancé démocratiquement, mais on va jusqu’à l’exclusion, en balisant le choix souverain du peuple. Alors que la souveraineté appartient au peuple. Ce choix est illimité et ne devrait souffrir d’aucune restriction.

Effectivement, la limitation d’âge pour être candidat à l’élection présidentielle est un véritable déni de démocratie. En d’autres termes, interdire à un citoyen de plus de 75 ans ou imposer une limite d’âge pour se porter candidat à la présidentielle, n’est pas du tout une bonne idée. C’est une discrimination vis-à-vis des personnes du troisième âge à protéger, car aussi vulnérables que les enfants et les femmes. C’est, en réalité, une idée dangereuse, car l’inclusion est une valeur consacrée par la Charte de la Transition qui fait office de Constitution en cette période charnière de l’histoire de notre pays.

Nul besoin de rappeler ici que l’idée de plafonnement de l’âge maximum pour être candidat à la magistrature suprême de notre pays va à contre-courant des dispositions de l’article 1er de la Charte de la Transition qui consacre les valeurs et principes d’inclusion. Cet article se voit, en effet, violer et fouler au pied dans les conclusions de ce Rapport. D’ailleurs, quoi de mieux que de laisser les électeurs eux-mêmes dire qu’ils ne sont pas pour les vieux présidents ? Pourquoi se substituer au peuple ? Pourquoi réfléchir à sa place ? Ce peuple de Guinée n’est-il pas assez mûr (bientôt 65 ans) pour savoir ce qu’il veut ? Quelle est l’opportunité d’une telle démarche aujourd’hui ?

Diantre ! N’infantilisons pas le peuple de Guinée. La Constitution américaine qui est l’une des plus achevées au monde, prévoit un âge minimum (35 ans) pour être président, mais elle ne prévoit à l’inverse aucun âge maximum. Il en est de même pour le pays de De Gaulle et beaucoup d’autres pays démocratiques.

Comme le dirait quelqu’un, avoir traversé des âges est une qualité et non une malédiction. Nous aspirons tous à cela. Je profite même de l’occasion pour rendre un vibrant hommage à toutes ces personnes du troisième âge.

Pour l’anecdote, le Président américain Joe Biden a été élu à la tête de son pays à 78 ans. Le Président Abdelaziz Bouteflika a 77ans ; le Président Mahmoud Selman Abbas de la Palestine a 87 ans ; le Président Giorgio Napolitano de l’Italie a 97 ans aujourd’hui. Pourquoi un pays comme le nôtre qui est à l’apprentissage de la démocratie mettrait-il une barrière d’âge ou limiterait-il l’âge pour être élu à la magistrature suprême ?

75 ans le maximum ? Evitons de tomber dans l’extrême. Il faut laisser le vaillant peuple de Guinée choisir dans les urnes entre les jeunes et les candidats âgés lors des échéances électorales prochaines. A vrai dire, l’âge d’un citoyen ne devrait en aucune manière être un problème à sa candidature pour l’élection présidentielle dans notre pays sinon, ce serait carrément une violation grave des dispositions de l’article 1er de la Charte de la Transition. Le plus important, c’est la santé mentale et physique du citoyen qui se porte candidat, surtout attesté par un collège de médecins.

Bref, vieillir en bonne santé physique et mentale est un mérite et non une malédiction, encore moins un handicap. Allons à l’essentiel !

Sayon MARA, Juriste