Le 09 mars de chaque année, l’humanité célèbre la journée mondiale du rein. Par an des milliers de personnes meurent de l’insuffisance rénale à travers le monde. En Guinée, c’est l’hôpital Donka qui abrite pour le moment le seul centre d’hémodialyse public. Sur place, seulement 30 unités de dialyse sont disponibles pour les patients se trouvant dans le besoin, a constaté un de nos reporters. Comment prévenir cette maladie ? Quels sont ses risques ?
Interrogé par la rédaction de maguineeinfos.org ce jeudi 09 mars 2023, Docteur Mamadou Saliou BALDE , médecin, Néphrologue à l’hôpital national Donka a évoqué le sujet. Selon notre interlocuteur, les grandes causes sont connues. C’est d’ailleurs les personnes hyper tendues et diabétiques qui sont les grands pourvoyeurs de maladie rénale dans le monde.
QUE REPRÉSENTE POUR VOUS LA JOURNÉE MONDIALE DU REIN ?
Pour nous les médecins néphrologues, la journée mondiale du rein est une fête pour nous, parce que c’est l’occasion où nous les néphrologues du monde entier, nous nous réunissons pour discuter et faire des missions de sensibilisation et d’information. On cherche à faire des dépistages de la maladie rénale et en même temps, faire des missions de communication pour bien informer la population sur la maladie rénale.
COMMENT PRÉVENIR PRÉVENIR L’INSUFFISANCE RÉNALE ?
L’insuffisance rénale est une maladie qu’on diagnostique à l’hôpital, c’est des patients à risque, par exemple, les personnes diabétiques, les personnes âgées ou les personnes qui ont des infections. Généralement quand ils sont hospitalisés, nous recherchons des signes d’atteinte rénale. Avec l’examen de la bandelette urinaire, nous voyons, est ce qu’ils ont des protéines dans les urines, des traces de sang dans les urines. Si c’est le cas, nous cherchons à savoir, comment fonctionne les reins de ce patient? Nous demandons des examens sanguins et après, nous cherchons à interpréter les résultats de ces examens sanguins. Nous allons demander la créatinine sanguine du patient. Quand le résultat vient, on voit que les résultats sont supérieurs à la normale, entre 88 à 102 micromoles par litre, si nous voyons que ça dépasse la valeur normale, on se pose la question, en se demandant est ce que son rein ne commence pas à être insuffisant? L’insuffisance rénale, on l’a rencontre très souvent, ce sont des personnes à risque, nous cherchons directement à voir si c’est une personne que nous pouvons guerrir rapidement, pour ne pas que ses reins se détruisent. Il y’a aussi des cas où des gens viennent à des stades avancés, même si nous faisons le diagnostique on voit que ses reins sont fatalement foutus. Dans ce cadre, ces patients sont définis comme des patients qui ont l’insuffisance rénale chronique terminale. De là, nous les mettons en hémodialyse. Donc pour prévenir l’insuffisance rénale, il faut dépister les gens très tôt.
QUELLES SONT LES CAUSES ET LES CONSÉQUENCES DE CETTE MALADIE ?
Les causes de cette maladie sont nombreuses. Les grandes causes sont connues. Les personnes hyper tendues, diabétiques sont les grands pourvoyeurs de maladie rénale dans le monde. Une personne qui a l’hypertension artérielle doit accepter de se faire suivre, il faut qu’ elle vienne régulièrement à l’hôpital, il faut que ses médicaments soient toujours à côté et que la personne surveille sa tension artérielle à domicile et si le médecin lui donne un rendez vous, qu’il accepte de le respecter et en même temps, qu’il accepte aussi de respecter le régime alimentaire que le médecin lui a prescrit. Les personnes diabétiques aussi, si leur diabète n’est pas bien équilibré, malheureusement, ça peut se terminer par l’insuffisance rénale. Il y’a aussi des causes héréditaires et des enfants qui sont nés de mal formation. Les conséquences, c’est de mettre le patient en hémodialyse. C’est un traitement qui demande beaucoup de moyens de la part non seulement de l’Etat et un grand engagement du patient lui-même. Donc il y’a les conséquences financières et humaines.
Y A-T-IL DES RISQUES DE MORTALITÉ?
Le risque de mortalité est très élevé, surtout si la personne n’est pas en hémodialyse.
QUELS SONT LES MOYENS ADAPTÉS POUR LUTTER CONTRE L’INSUFFISANCE RÉNALE
Avant tout d’abord, c’est la prévention primaire, il faut qu’on aille vers la population, faire des dépistages, pour savoir quelles sont les personnes à risque. Il faut aussi que les médecins généralistes, eux mêmes dans leur cabinet ou dans leur lieu de suivi des malades acceptent de faire le dépistage. Il faut faire virer la créatinine, demander l’échographie rénale des patients, lorsque la maladie est suspectée, on doit l’orienter directement vers le médecin néphrologue .
QUELLES SONT LES DIFFICULTÉS QUE VOUS RENCONTREZ EN TANT QUE NÉPHROLOGUE?
Les difficultés que nous rencontrons dans la prise en charge de ces malades est le manque d’information, le manque de dépistage précoce. Malheureusement, le seul service de néphrologie qui existe, c’est Donka. Imaginez le patient de l’intérieur du pays, il doit traverser combien de kilomètres avant d’arriver à Conakry et s’il est dans un état d’urgence, le risque de mortalité peut arriver à tout moment en cours de route. Actuellement, l’Etat est en train de faire une mission de décentralisation de la prise en charge de la maladie rénale. Après cela, tout ne sera plus concentré à Conakry. Il y’aura des unités de néphrologie qui seront ouvertes à N’Zerekoré, Kankan, Labé et Mamou. Avec cette décentralisation, nous pensons pouvoir palier à ses difficultés d’éloignement de ces patients.
L’autre difficulté, c’est la prise en charge de ces patients, la seule unité de néphrologie qu’on avait c’est Donka. Maintenant avec la décentralisation, des néphrologues ont été déjà formés et qui seront redistribués à l’intérieur du pays. Cela permettra de limiter au maximum les difficultés que nous rencontrons. Pour le moment, nous n’avons qu’un seul centre d’hémodialyse public comportant 30 unités de dialyse.
LE PATIENT DOIT PAYER COMBIEN POUR SE FAIRE SOIGNER ?
Il y’a d’abord le coût de la prise en charge médicale du patient, quand le patient arrive, nous lui faisons des ordonnances, nous demandons des examens qu’il va faire. Donc il n’y a pas un coup exact, chaque patient varie en fonction de son état. Lorsque le patient a l’insuffisance rénale chronique, il doit faire hémodialyse. Une séance d’hémodialyse à Donka coûte 25.000 fg , donc c’est une prise en charge purement étatique. Si nous prenons une seule séance dans les centres privés, le patient peut payer plus d’un million ou plus.
Entretien réalisé par Ousmane Baldé