Espérer des institutions fortes sans réfléchir sur ceux qui peuvent les incarner, c’est comme « fuir la pluie pour se jeter dans la rivière ». Autant nous devons permettre des mécanismes qui rendent fortes et indépendantes les institutions républicaines, autant il nécessite de provoquer l’idéal du guinéen nouveau, débarrassé des tares accumulés par une société qui refuse de faire son diagnostic clinique. Cela passe nécessairement par la lutte contre l’impunité et la corruption, par la justice, rendre nécessaire l’approbation de l’Assemblée nationale pour certaines nominations, instaurer la culture de l’alternance politique au sein des partis et insister sur l’Education citoyenne.
Oui, au moment où tous semblent être davantage occupés par des querelles politiciennes, je voudrais plaider pour l’Éducation nationale. Il est temps de repenser sérieusement et sereinement notre système éducatif en insistant sur les programmes d’éducation civique, d’incitation au patriotisme et à la conscience historique en enseignant de manière approfondie notre histoire commune, notre sociologue pour magnifier la beauté de l’unité dans la diversité ; enseigner davantage la géographie du pays, ses richesses du sol et du sous-sol pour préparer une nouvelle génération de guinéens conscients des enjeux géopolitiques et géostratégiques.
Autrement, comment rendre les institutions inébranlables quand celles et ceux qui doivent conduire leur destinée n’ont aucun principe à sauvegarder ? C’est bien là la difficulté, et peut-être la contradiction imparable à ce que croyait dur comme fer Obama en visite à Dakar, quand il y affirma que « l’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts, mais d’institutions fortes ». Notre bon-homme avait-il oublié que ce sont les hommes qui les font fonctionner ?
Prenez par exemple la question du troisième mandat d’Alpha Condé, c’est un triste vécu dont il faudrait toujours se souvenir. Il a fallu la volonté d’un seul homme et des courtisans de Palais pour remettre en question tous les acquis démocratiques et institutionnels obtenus de longues luttes. Nous avions pour une première fois une Constitution avec des verrous, des intangibilités constitutionnelles claires, et une Cour constitutionnelle chargée du Contrôle de Constitutionnalité.
Le Président de la République a créé les conditions d’interprétations éparses de la Constitution, quand bien même il aurait pu envisager se retirer tout sagement créant les conditions de l’alternance politique. Pour cela, il n’est allé loin, il a eu la bénédiction des hauts magistrats de la Cour constitutionnelle qui lui ont donné un avis favorable à son projet, alors que leur veto aurait suffit pour ébranler toute la cabale. Ces grands sages dit-on se sont ainsi fourvoyés, accompagnés des figures d’intellectuels et pas des moindres.
Par Ali CAMARA