Retenu comme le cerveau dans le dossier du massacre d’environ 157 personnes au stade de Conakry, le 28 septembre 2009. Aboubacar Sikidi Diakité allias Toumba connaît de nos jours toutes les galères de l’enfer carcéral selon ses avocats. Présentant toujours un état de santé dégradant, l’ancien aide de camp du capitaine Moussa Dadis Camara dont le mandat de dépôt n’a pas été renouvelé serait donc incarcéré de façon arbitraire à en croire Maître Paul Yomba Kourouma, un de ses conseils qui a été rencontré ce lundi, 16 mars 2020 par un reporter de maguineeinfos.com.

Dans cette interview de 15 minutes, l’avocat revient lamentablement sur la situation carcérale de son client et parle d’une violation de procédure.

Maguineeinfos.com: Vous êtes le conseil de l’ancien aide de camp du capitaine Moussa Dadis Camara détenu à la maison d’arrêt de Conakry depuis mars 2017. Dites nous qu’en est de sa situation carcérale aujourd’hui?

Maître Paul Yomba: Le cas d’Aboubacar Sidiki Diakité alias Toumba, préoccupe aujourd’hui à plus d’un titre parce que pratiquement nous ne savons plus sur quel pied se tenir. Nous avons saisi toutes les instances juridictionnelles du pays, qui ont brillé par leur déni de justice, leur mutisme, jusque même la cour suprême, qui saisit en matière d’urgence. Mais elle n’a même pas ouvert le dossier, ne l’a pas évoqué, le laissant ainsi dans l’ombre et Toumba connaît à date, la pire des détentions.

Aujourd’hui le pool d’avocats en charge de défendre le commandant Toumba Diakité crie au non renouvellement de son mandat de dépôt, dites nous ce qui se passe ?

Toumba est à ce jour arbitrairement détenu vu le non renouvellement de son mandat dont vous avez tout de suite évoqué. Un mandat qui, d’office devrait occasionner sa mise en liberté définitive. Il croupit en prison pourtant il est inculpé, interpellé au même titre que bon nombre de ses collègues qui eux, émergent dans les hautes sphères de l’administration publique, qui jouissent de tous les avantages de leur rang, mais qui, malheureusement n’ont pas connu l’épreuve de la détention, dont la plupart d’ailleurs n’ont été entendus qu’en première comparution. C’est-à-dire que le juge ne leur a posé des questions que de savoir,  » reconnaissez vous oui ou non les faits? Non je ne reconnais pas les faits! » , et c’est terminé. Donc, le dossier en ce qui les concerne est bouclé. Malgré les témoignages à décharge en la faveur de mon client par les leaders de l’opposition qu’il a sauvés, malgré qu’aucune preuve accablante pour assoir l’une des 15 inculpations contre lui, il n’a pu bénéficier d’une liberté provisoire. Il n’a pu être confronté avec qui que ce soit.

Lors de votre dernière sortie dans cette affaire, vous aviez mis sous l’éclat des projecteurs l’état de santé de votre client, cet état de santé est-il toujours dégradant?

Puisqu’il n’a jamais été soigné malgré les diagnostics posés par les biologistes et les cardiologues de l’hôpital ignace deen qui l’ont déclaré apte à l’intervention, Toumba n’a pas connu le moindre soin infirmier. Il ne doit sa vie aujourd’hui qu’à sa profession puisqu’il est lui-même médecin. Donc son auto-médication lui sauve aujourd’hui la vie. Nous avons crié sur tous les toits, nous avons demandé qu’il nous soit rendu ne se reste que pour le temps de son traitement même pas à la charge de l’État, mais aucune réponse. Le ministre partant d’ailleurs nous a dit que Toumba n’irait jamais se traiter, or il s’agit d’une pathologie qui requiert une intervention délicate.

L’arrivée de l’actuel ministre de la justice vous a plongé dans un fleuve d’espoir de voir enfin le procès s’ouvrir dans ce dossier, est-ce que vous le regrettez aujourd’hui?

Oui ça été une grande déception pour nous. Vous avez d’ailleurs vu le ministre de la justice dans sa dernière sortie quand il se mêle d’un dossier qui n’est pas le sien, quand il parle même de dossier individuel, quand au lieu de tirer des conséquences de toutes les irrégularités commises par ses prédécesseurs et par les magistrats puisque lui-même il est magistrat de carrière, il désinforme le public en disant que Toumba est poursuivi pour deux infractions dont cette affaire du 28 septembre et la seconde qu’il qualifie de tentative dassasinat contre le capitaine Moussa Dadis Camara qui est complètement ignoré de mon client. Aucune notification de charge dans ce sens là ne lui a été faite. Nous ne sommes en possession d’aucune pièce de procédure afférente à cette affaire, que le ministre aille dire que Toumba à deux infractions qui pèsent sur lui. Ce qui veut dire que même s’il arrive à être sauvé pour le 28 septembre, il serait gardé pour la tentative d’assassinat contre Dadis.

Est-ce que vous êtes de ceux qui pensent que Toumba serait ce bourreau à sacrifier pour faire oublier cette affaire du massacre de 157 personnes au stade de Conakry le 28 septembre 2009?

Oui bien sûr! Toumba c’est l’agneau sacrifié et c’est lui qui va expier la forfaiture de ses pairs. Il est gardé parce que le procès ne tient qu’à lui car il ne porte d’ailleurs que son nom malgré l’absence totale de charge à son encontre.

Est-ce que vous croyez encore à une ouverture de procès dans ce dossier qui s’avère désormais fleuve?

Je ne crois pas du tout à la tenue de ce procès. Le bâtiment même qui doit abriter ce procès, est à la période de fouille. La liberté de Toumba est compromise et sa détention préventive est prolongée et est d’ailleurs arbitraire puisqu’il a été renvoyé devant le tribunal criminel de dixinn pour y être jugé conformément à la loi. Curieusement nous apprenons que ce sera maintenant un tribunal spécial qui sera chargé de ce dossier et l’on va recruter dans toutes les juridictions de ce pays.

Selon des indiscrétions, Toumba serait révolté en prison ces jours-ci, confirmez-vous cette information?

C’est l’état naturel de toute personne brimée, la réaction appropriée à l’injustice, à l’arbitraire et à l’inégalité de tous devant la loi, à la discrimination à laquelle il fait face pendant plusieurs années maintenant .
Aboubacar Sidiki Diakité aujourd’hui est ingérable parce que nous, nous avons épuisé tous les gaz d’espoir que nous pouvions lui transmettre pour au moins lui permettre d’avoir un séjour carcéral emprunt de morale, mais nous n’avons plus rien à lui dire car lui-même en tire les conséquences.

À date, il vous reste t-il encore d’énergie pour sauver votre client de ces deux chefs d’accusation?

Nous avons fini avec nos autorités. Nous avons éprouvé notre justice, nous l’avons trouvé incapable de s’affirmer et dire le Droit pour être dans le concert des Nations de Droit et de justice. Nous avons saisi le TPI de dixinn compétent en la matière, nous avons saisi la cour d’appel, la cour suprême, mais aucune suite favorable. À ce jour, nous avons préparé la saisine de la cour de justice de la CEDEAO afin que finalement le Droit soit dit.

Maître on ne tient qu’à vous dire merci d’avoir répondu à nos questions!

C’est moi qui vous remercie!

Interview réalisée par Bah Mohamed
Pour maguineeinfos.com