La Guinée observe depuis juillet dernier, le repos biologique dans ses forêts. Une période pendant laquelle, l’exploitation irrationnelle des produits forestiers et fauniques est interdite. Selon le colonel Layaly Camara, directeur national des eaux et forêts avec qui la rédaction de maguineeinfos.com a eu toute l’occasion de discuter des questions environnementales, les autorités sont engagées à faire respecter ces mesures et appliquer la loi sur tout braconnier qui tenterait de braver cette interdiction. À notre micro, il est aussi revenu sur l’impact de l’exploitation minière, les actions envisagées pour les fleuves Milo et Niger menacés d’extinction avant d’ouvrir une fenêtre sur l’enfer des populations de l’île de Kaback.
Nous vous proposons l’intégralité de notre entretien ci-dessous !
Maguineeinfos.com : d’entrée, parlez nous de l’état actuel de nos eaux et forêts !
Pour parler de façon exacte sur l’état de nos forêts, il faut procéder à un inventaire. Un inventaire multi ressources, pour savoir quelle est la dynamique au niveau des écosystèmes forestiers. Mais malheureusement, nous ne détenons pas exactement les résultats sur l’existence. Cependant, nous avons mis une stratégie de protection et de conservation des ressources forestières et fauniques. Là, avec le déploiement de nos agents sur le terrain, des mesures sont prises pour diminuer ou endiguer certaines mauvaises pratiques comme l’exploitation anarchique du bois dans les zones sensibles avec les écosystèmes fragiles, le braconnage et le commerce illégal des produits forestiers ligneux ou non ligneux, le commerce des espèces de faune intégralement protégées. Toutes ces mesures concourent au renforcement de la gestion de nos ressources forestières à une meilleure conservation de ce que nous disposons à l’échelle nationale.
Maguineeinfos.com : en ce moment même, nous observons une période de repos biologique, dites nous, qu’est-ce qui se passe sur le terrain ?
Effectivement depuis le 01 au 15 juillet, le repos biologique a été entamé. Pour le moment c’est respecté à la lettre. Parce qu’avant le lancement, il y’a eu des décisions qui ont été prises à tous les niveaux pour le respect scrupuleux du repos biologique. Cette action vise surtout à permettre aux écosystèmes forestiers de se reconstituer. Donc, c’est la période de reproduction et aussi, de mouvements d’extraction car cette période est très difficile. Ça a un impact négatif parce qu’avec l’eau, les zones sont mouillées et les mouvements sont difficiles. Donc, ça occasionne beaucoup de pertes au niveau des jeunes plants. C’est pourquoi, cette période a été choisie. Pour le moment c’est respecté et nous tenons à ce que ça continue jusqu’à la fin de la période de repos.
Maguineeinfos.com : puisque vous parlez du braconnage, souvent il y’a des gens qui tentent de braver l’interdiction de la coupe et le transport illicites du bois. Ces braconniers une fois appréhendés, quelle va être la sanction ?
Une fois que l’individu est appréhendé, la main dans le sac, il passe devant la justice. Ça c’est incontournable.
Maguineeinfos.com : depuis le début de cette période de repos biologique, est-ce que vous avez mis la main sur certains braconniers et si oui, sont-ils aujourd’hui sous l’emprise d’une certaine sanctions ?
Bien sûr et nous avons des exemples car certains sont aujourd’hui jugés et emprisonnés, d’autres ont payé des amendes. Donc avec ça, on n’hésite pas. Ça, c’est la tolérance zéro. Depuis l’arrivée du ministre d’État en charge de l’environnement, des mesures ont été prises pour l’application correcte des modalités avec la Convention sur le Commerce International des Espèces de faune et de flore menacées d’extinction (CITES). Donc là, la loi est appliquée.
Maguineeinfos.com : sur le plan du reboisement, combien d’hectares sont prévus pendant ce repos biologique ?
Cette année au cours du lancement, nous avons envisagé 100 hectares à reboiser. Mais l’effort ne se limite pas là-bas. Il y’a non seulement le reboisement au niveau des différentes sections, mais aussi des entretiens des plantations réalisées l’année dernière dans le cadre de l’initiative présidentielle. Donc cette année, nous avons privilégié certains écosystèmes stratégiques. Je veux parler des berges des barrages de souapiti et kaleta. Et qui dit barrage, dit eau et pour conserver et protéger cette eau, il faut que les berges soient suffisamment reboisées. En ce moment, nous assistons à une forte infiltration du ruissellement. Parce que quand des zones sont dégradées, nous assistons à l’érosion et à un plus fort ruissellement des eaux. C’est ce qui provoque souvent l’ensablement. Mais quand la zone est reboisée, l’eau descend directement au niveau du lac et s’accumule là-bas. En plus, il ya des fleuves comme le Milo et le Niger qui font partie de ce plan de reboisement. Le Milo est ensablé avec la construction anarchique des fours à briques malgré les campagnes de sensibilisation et surtout la bonne initiative lancée par monsieur le président de la République, le professeur Alpha Condé avec l’octroi des machines pour la fabrication des briques à terre stabilisée. Cette pratique continue encore malheureusement à détruire nos écosystèmes forestiers tant qu’en terme de décapage, qu’en terme de l’extraction des bois pour faire cuire des briques.
Maguineeinfos.com :parlons un peu de ce fleuve Milo qui si rien n’est fait, ne va pas plus exister dans deux ou trois ans. À part ces actions annoncées, y’a t-il d’autres actions en perspective pour lui sauver d’extinction ?
Ah oui! Il faut impérativement que tout un chacun s’implique. Le fleuve Milo et le fleuve Niger, c’est des éléments de civilisation. Notre existence est liée à ces fleuves là. Si ces fleuves là n’existaient pas, nous serions déjà des réfugiés écologiques. Aller ailleurs parce qu’il n’y a pas d’eau. Et sans l’eau, il n’y pas de vie. Don nous avons intérêt à sensibiliser les populations pour qu’elles prennent conscience de la nécessité de protéger ces fleuves là. Mais il faut aussi voir l’aspect international. Le niger arrose neuf pays. La responsabilité de la Guinée, mais c’est pas à son seul niveau. Tous les pays bénéficiaires qui sont arrosés, doivent impérativement nous appuyer avec le reboisement en amont, c’est-à-dire au niveau des têtes de sources. Au niveau du début des cours d’eau. Parce que si ces cours d’eau disparaissent, ce sera de la catastrophe écologique au niveau sous régional.
Maguineeinfos.com : dans le dernier pan de cette interview, parlons un peu des sociétés minières. Quand dites vous de leurs impacts aujourd’hui sur la faune et la flore?
Elles ont évidemment un impact considérable. L’exploitation minière contribue inexorablement à la dégradation de l’environnement. Et c’est une réalité. Des conventions sont établies entre ces sociétés et le gouvernement. Mais il y’a certaines qui s’acquittent et d’autres non. Il faut qu’on se dise la vérité ! Il y’a aussi certains citoyens, qui font le dragage des cours d’eau. Ça, ça détruit la biodiversité, ça modifie le passage des cours d’eau par endroits. Donc ce sont des actions à réprimer. Les sociétés minières doivent respecter leurs engagements en tenant compte des actions qui doivent être menées pour une compensation des zones détruites. Il faut que les zones exploitées soient restaurées. Cest ce qui peut conduire à l’équilibre écologique.
Maguineeinfos.com : un mot sur l’île de Kaback qui lutte en ce moment pour sa survie.
Bon j’ai pas tellement d’information, mais je crois qu’il y a nécessité de reboisement. Il ya des partenaires hollandais qui s’étaient présentés en 2018. Avec eux, nous avons échangé parce que c’est des actions combinées. Il ya l’agriculture, la foresterie, la saponification et bien d’autres activités que mènent les populations. Et en matière de foresterie, cest surtout la mangrove qui est un écosystème très très important et particulier, qui est l’habitat idéal pour les poissons et d’autres espèces qui sont très importantes en matière de biodiversité qui en paie les frais. Donc là avec ces partenaires, nous attendons à ce qu’ils s’impliquent dans nos processus de reboisement des zones dégradées de la mangrove. Si Kaback est détruit aujourd’hui, c’est le fait que la mangrove qui servait de brise-vent, de moyens de protection n’existe plus.
Interview réalisée par BAH Mohamed
Pour maguineeinfos.com