La première dimension de l’Etat est sa capacité à cristalliser une identité collective, le plus souvent sous la forme d’une identité nationale. Ses formes fonctionnelles reposent sur les légitimités politique (légitimité des dirigeants aux yeux de la population) et institutionnelle (légitimité des institutions aux yeux de la population). Un Etat nation fonctionnel est un Etat qui sait tisser des liens entre la population sur des valeurs positives, par opposition aux valeurs négatives basées sur la distinction d’une communauté à l’égard d’une autre : l’Etat doit s’adresser à l’ensemble de la population. Il doit se poser en arbitre au-dessus des appartenances et des litiges entre communautés. C’est de lui que doit émerger le modèle de la valorisation et la préservation de l’intérêt commun.
Ce que vit la République de Guinée n’est pas très honorant, vide de toute noblesse et d’intelligence. C’est vrai, nous vivons un multipartisme intégral où chaque citoyen de ce pays est libre d’adhérer au parti politique de son libre choix. Ce choix doit-il être assujetti à l’appartenance ethnique, religieuse, régionaliste ?
Nous avons opté pour un modèle de gouvernance démocratique dont les élections sont des parties intégrantes pour le choix du Président de la République, des députés, des maires.
C’est trivial que la gouvernance démocratique a des exigences de fonctionnement auxquelles tout citoyen normatif adhère dont le respect de l’opinion, le respect des Institutions, le droit de vote, la libre circulation, la laïcité, la vertu républicaine, les institutions et l’administration pour le service public….
Alors pourquoi de telle bestialité à chaque cycle électoral ?
Pourquoi autant de morts dans notre pays ?
Pourquoi nous refusons de sortir de cette bulle ethniciste ?
Pourquoi ce manque de justice sociale ?
Pourquoi nous souhaitons une guerre civile dans notre pays ? Je déteste le président de la République, donc le pays doit brûler ?
Pourquoi nous pactisons avec le colmatage institutionnel dans notre pays ?
Pourquoi cette immaturité du personnel politique ?
Quel est notre intérêt pour ce pays ?
Me sentir guinéen rime avec mon ethnie au pouvoir ?
Pourquoi la suspicion, le manque de confiance gangrènent le personnel politique guinéen ?
Pourquoi les propos de violence de part et d’autre ?
Le personnel politique a-t-il assimilé la finalité d’une lutte politique ?
L’offre politique de l’exécutif doit apporter une solution aux maux de notre société, une solution globale et non biaisée, le tout moulé sous le manteau d’un leadership transformationnel conséquent, futuriste.
Une évidence, les élections sont un élément central d’une démocratie. Dans l’idéal, elles permettent une transmission pacifique du pouvoir. Dans les pays déjà touchés par des conflits, elles sont toutefois souvent synonymes de violence accrue. Quelles conditions favorisent la violence électorale ? Cette violence permet-elle toujours d’atteindre le résultat souhaité ?
Rien n’éveille les énergies, inquiétudes, espoirs, et frustrations relatives à la démocratie autant qu’une élection. La qualité d’une élection peut faire toute la différence entre un feu de cuisson et une explosion. C’est pourquoi l’organe de gestion des élections (CENI) est appelé à plus de responsabilité, de transparence, de professionnalisme dans sa délicate mission.
La tenue d’élections régulières dans un pays à ce 21 ème siècle doit être un rituel maîtrisé, mais encore marquée par diverses pesanteurs sociologiques en Guinée comme dans d’autres pays africains et par les complexes rapports de force internes voulus à dessein ( le fameux « notre tour »).
Les études montrent qu’il existe dans le continent des pratiques hybrides du politique. La maturité électorale est encore diversement acquise et la maturité démocratique demeure le plus souvent incertaine comme celle de la Guinée.
Si une élection réussie peut calmer et rassembler une nation (Namibie, le Ghana par exemple), une élection aux résultats contestés peut la diviser voire entraîner un conflit communautaire débouchant sur l’implosion de la République.
La République fonctionnant selon le principe du gouvernement représentatif, la fonction première de l’élection est de permettre aux citoyens de choisir leurs gouvernants et leurs représentants, qui rédigeront et voteront la loi en leur nom au Parlement.
Ainsi, l’élection est une délégation de Souveraineté. Elle constitue, au sein d’une société organisée, une « soupape de sécurité ».
En effet, la possibilité pour les citoyens de pouvoir régulièrement exprimer leur mécontentement ou, au contraire, donner un nouveau mandat au pouvoir sortant, évite que les désaccords politiques majeurs ne trouvent un autre terrain d’expression (la rue), voire d’autres modalités (la violence). Si nous ne prenons garde, à travers cette élection, nous risquons de basculer et saper l’avenir de nos enfants.
Par Mohamed Doussou KEITA,
Enseignant chercheur