Du retard, du retard… La Commission a entamé une procédure d’infraction à l’encontre de 23 États membres, dont la France, pour n’avoir pas mis en œuvre la directive dite SMA (Services de médias audiovisuels), adoptée le 14 novembre 2018. Tous avaient jusqu’au 19 septembre 2020 pour transposer le texte (y compris les décrets d’application) dans leur droit national et le notifier à la Commission. Seuls quatre États membres ont respecté le délai convenu des 21 mois. Une fois n’est pas coutume, la Hongrie fait partie des bons élèves avec les Pays-Bas, la Suède, et le Danemark.

L’Union européenne se gargarise de ses « valeurs », mais quand il s’agit de défendre la diversité de la culture européenne sur le Net, les gouvernements traînent la savate. Car la directive SMA a pour objet d’introduire une régulation non seulement sur les services en ligne des chaînes de télévision mais aussi sur les plateformes VOD (MyTF1, 6Play, Netflix, Amazon Prime Vidéos, CanalPlay…), ainsi que sur les plateformes de partage vidéo (YouTube, Dailymotion, Vimeo, Facebook…).

Rééquilibrer la concurrence entre les chaînes de télé et les plateformes

Pour la VOD, la directive met en place une obligation de proposer au public une offre de programmes européens d’au moins 30 % et de les mettre en valeur. Le texte permet au passage de rétablir un peu d’équilibre entre les chaînes de télévision traditionnelle (sur lesquelles reposent de très nombreuses obligations) tandis que les plateformes en ligne américaines n’en ont aucune… « Nous voulons des conditions de concurrence équitables pour tous les acteurs des médias », a rappelé Margrethe Vestager, la commissaire à la concurrence, vice-présidente de la Commission. Les États membres pourraient, dans certaines conditions, imposer aux fournisseurs de services de médias de contribuer au financement de production d’œuvres de fiction françaises et européennes.

La directive SMA introduit également des mesures de protection des mineurs contre la pornographie, la violence gratuite ou l’utilisation de leurs données dans le but d’un démarchage ou d’une publicité ciblée. « Ces règles apportent une meilleure protection de tous les téléspectateurs, en particulier les plus vulnérables tels que les mineurs, favorisent la diversité culturelle et préservent le pluralisme des médias. Elles ne doivent cependant pas rester lettre morte, mais être appliquées pour que ces avantages deviennent une réalité, avertit Thierry Breton, le commissaire au Marché unique et au Numérique. J’invite les États membres à les mettre en œuvre sans plus tarder afin de garantir un environnement en ligne plus sûr, plus équitable et plus diversifié. »

La Belgique, la Bulgarie, la République tchèque, l’Allemagne, l’Estonie, l’Irlande, la Grèce, l’Espagne, la France, la Croatie, l’Italie, Chypre, la Lettonie, la Lituanie, le Luxembourg, Malte, l’Autriche, la Pologne, le Portugal, la Roumanie, la Slovénie, la Slovaquie, la Finlande et le Royaume-Uni ont tous reçu une lettre de mise en demeure. Ils ont deux mois pour y répondre.

Le gouvernement, dans l’urgence, a fait adopter au Parlement un amendement au projet de loi DDADUE habilitant le gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance pour transposer un ensemble de 18 ( !) directives européennes, dont la directive SMA. Le 18 novembre, le projet de loi a été adopté définitivement par les députés. Mais il reste encore l’étape des décrets d’application… Ce qui peut prendre beaucoup de temps.

Source: Lepoint.fr