Ma Guinée te revoilà ! (Amadou Diouldé Diallo)
Comme au confluent de nos majestueux fleuves, au carrefour de nos riches terroirs et de nos grandes civilisations, nous voici en ce 1er octobre jour d’anniversaire de la grande Chine et veille de l’acquisition de notre indépendance, face à l’histoire, à notre histoire.
Celle qui vient de s’écrire en marbre au moment où bon nombre de signaux étaient au rouge, et que l’implosion du pays était quasi certaine.
Mais comme par le passé, les Guinéens viennent une fois encore de donner la leçon de leurs capacités à surmonter les épreuves du temps et à sauver l’essentiel du péril, ramenant du coup les fameux connaisseurs de l’histoire et de la sociologie de notre peuple, sur les bancs de notre école afin qu’ils apprennent mieux à nous connaître.
Durant toute la colonisation, la Guinée a été le seul pays africain à avoir 10 résistants connus à la pénétration coloniale et la plus remarquable par la durée avec l’Almamy Samory Touré (18 ans).
Dans un contexte de décolonisation difficile, notre pays a été le premier de l’espace francophone à opter pour l’indépendance immédiate le 28 septembre 1958.
Et quand après 26 ans de règne sans partage, Ahmed Sékou Touré, le père de l’indépendance mourut le 26 mars 1984, et que ses compagnons se livrèrent à une impitoyable bataille de succession, c’est notre armée, sous la direction du colonel Lansana Conté qui a sauvé le pays d’un embrasement inévitable. ³
A la mort de ce dernier en décembre 2008, des clans se formèrent en vue de s’installer à Sékhoutouréya. Leurs velléités seront de courte durée, car l’armée guinéenne une fois encore, a pris ses responsabilités. Le capitaine Moussa Dadis Camara succéda au général Lansana Conté.
Malheureusement, ses intentions de se porter candidat à la présidentielle en flagrante violation de la parole donnée, lui vaudront d’être écarté au profit du Général Sékouba Konaté alors ministre de la Défense. Ce dernier, bien que militaire et fils de militaire, donc dans l’âme, organisera l’élection présidentielles de 2010 à laquelle il ne se porta pas candidat.
A l’issue de celle-ci, Alpha Condé a été proclamé vainqueur et le pouvoir a quiité alors la caserne pour la résidence civile. La Constitution conférait à Alpha Condé deux mandats, non renouvelables.
Subjugué par les délices du pouvoir exercé dans un autoritarisme arrogant et poussé par des extrémistes et opportunistes de tout acabit, le vieil opposant historique a passé outre les contestations et les manifestations populaires, les mises en garde de la communauté internationale et de ses amis, pour réprimer dans le sang et la prison, tous ceux qui s’opposaient à son 3e mandat.
Les Guinéens sont tués, blessés, emprisonnés, dépouillés jusqu’à leur dignité et à leur honneur. Une véritable chape de plomb s’abat alors sur le pays, réduit à vivre dans la hantise et la peur du lendemain.
On en était là, lorsque l’armée guinéenne a volé au secours de son peuple le 5 septembre 2021, pratiquement à la surprise générale. Les Forces spéciales vaillamment menées par le colonel Mamadi Doumbouya vont mettre un terme à l’impitoyable dictature d’Alpha Condé.
La Guinée entière exulte et apporte son soutien au CNRD (Comité national du rassemblement pour le développement), de même que les pays voisins et la diaspora.
Ainsi, se referme alors la parenthèse Alpha Condé, la messe est dite pour celui qui se prenait pour un messie, un Nelson Mandela. La Guinée ouvre une nouvelle page de son histoire qui, tout au long de son cheminement, est marquée de symboles forts incarnés par des hommes qui apparaissent souvent comme des sauveurs. C’est bien le cas du colonel Mamadi Doumbouya.
Sa prestation de serment de ce vendredi saint (1er octobre) est pleine d’espérance dans la mesure où il est apparu tout d’abord comme fils avec sa mère et sa femme à ses côtés.
Oui sa mère Hadja Mandioula Sylla qui certainement mettait pied au Palais des Nations pour la première fois de sa vie. Femme au foyer, ménagère dévouée au cœur du social de son quartier Banankoroda à Kankan, je comprends la peine et l’angoisse qui hantent la mère d’un militaire surtout de la légion étrangère, toujours au front jusqu’à la poudrière d’Afghanistan.
Comme l’a été Hadja Mafoudia Camara dite «M’Mah », qui de son village de Wawa dans le Bouramaya-fassa (Dubréka), s’inquiétait du sort de son fils Lansana Conté, artilleur d’exception sur les fronts d’Algérie, de Tamara, pendant l’agression du 22 novembre 70 et de la Guinée-Bissau en soutien au PAIGC.
De maman Jeanne de Kissidougou, la mère du Général Sékouba Konat, lorsque ce dernier assurait le commandement des troupes sur le front de la Forêt contre les rebelles (septembre 2000).
Être fils d’une mère et d’une famille et le revendiquer publiquement avant de se reconnaître chef de l’Etat, voilà le message fort que le colonel Mamadi Doumbouya a envoyé aux Guinéens ce vendredi, 1er octobre 2021.
Comme l’ont tout naturellement fait Ahmed Sékou Touré, le fils de N’na Aminata Fadiga et le capitaine Moussa Dadis Camara.
L’intégration par le multiculturalisme a pris les couleurs de la brillance du couchant à cette prestation de serment, par la toute nouvelle Première Dame de la République de Guinée, LAURIANNE DOUMBOUYA, une française, gendarme en activité.
Donc, le couple présidentiel guinéen est de la même pâte.
L’histoire analysante et cristallisante donne un nouveau rendez-vous à notre pays et à notre peuple. Nous devons y être forcément, fièrement, car comme le disait Alfred de Musset citation: «La vie est une rose dont chaque pétale est une illusion, et chaque épine une réalité », fin de citation.
Amadou Diouldé Diallo
Journaliste-historien depuis
Clermont Ferrand en France