Si l’on peut facilement opposer une règle de Droit à une personne, du fait de son caractère impératif, général et impersonnel, il en est tout autre quand il s’agit de morale/éthique. Ces notions portent à confusion et à juste titre.

Commençons par tenter de démêler deux notions si confondues, proches mais distincts à bien des égards : MORALE et ÉTHIQUE.

La MORALE (du latin moralis « relatif aux mœurs ») est une notion qui désigne l’ensemble des règles ou préceptes, obligations ou interdictions relatifs à la conformation de l’action humaine aux mœurs et aux usages d’une société donnée.

L’éthique est une discipline philosophique portant sur les jugements moraux et dont le concept est donc très proche de celui de la morale. C’est une réflexion fondamentale de tout peuple afin d’établir ses normes, ses limites et ses devoirs.

Avouons que ces deux définitions ne nous permettent pas de lever complètement l’équivoque sur ces deux notions philosophiques, cela est d’autant plus vrai que beaucoup de traducteurs des philosophes antiques ne faisaient pas de distinction, ce qui accentue la confusion.

Cependant, retenons que la morale est très relative, spéculative et différente d’un groupe à un autre, un pays à un autre ou une époque à une autre. C’est l’ensemble des normes propres à un individu, à un groupe social ou à un peuple, à un moment précis de son histoire.

Alors que l’éthique se veut plutôt comme régulatrice, pour Aristote et Kant « l’éthique a pour but de définir ce qui doit être », elle transcende donc la morale de par son caractère universaliste. L’Éthique est la recherche du bien par un raisonnement conscient. Durant l’époque moderne, le terme « éthique » est généralement employé pour qualifier des réflexions théoriques portant sur la valeur des pratiques et sur les conditions de ces pratiques ; l’éthique est aussi un raisonnement critique sur la moralité des actions.

La distinction entre morale et éthique réside dans le fait le premier se contente d’ériger des règles, de refuser tout écart avec elle par un jugement purement moral ; alors que l’éthique repose sa légitimité dans une démarche réflexive dont la finalité est la recherche du bien, de ce qui peut améliorer la vie des gens. Raison pour laquelle beaucoup de professions (avocat, médecin, pharmacien, ingénieur, …) érigent des règles éthiques en règles impératives opposables aux membres. L’objectif ultime d’une règle éthique est de devenir juridique ou du moins inspirer le législateur.

La dichotomie Morale/Éthique sera explicitée par le philosophe STÉPHANE SANGRAL, dans Fatras du Soi, fracas de l’Autre, comme, pour la morale, un ensemble de valeurs et de règles arbitraires et propres à chaque groupe, « un linceul crasseux qui recouvre le vivre-ensemble », et comme, pour l’éthique, un ensemble de valeurs et de règles universelles (duquel la morale parfois s’inspire, mais parfois seulement) liées à l’empathie, « un drap blanc sur lequel repose la cohérence du vivre-ensemble ». La notion d’éthique personnelle ne qualifiant alors que le degré d’appropriation personnelle de l’éthique universelle.

QU’ATTENDONS-NOUS DE NOS DIRIGEANTS OU DU MOINS CEUX ET CELLES QUI ASPIRENT À LE DEVENIR SUR CES DEUX TERRAINS ?

Cette question nous amène à une autre qui est celle de savoir SI L’ÉLITE DOIT AVOIR UNE MORALE/ÉTHIQUE EXEMPLAIRE ? dans tous les cas, aspirer à gouverner et se situer dans cette démarche fait peser sur soi un regard plus exigeant, une attente plus ferme et une conduite plus exemplaire car, le peuple cherche à corriger ses imperfections en ses dirigeants. On sera plus tolérants pour un homme ordinaire qui serait pris dans la chambre d’autrui avec la femme d’autrui qu’à l’égard d’un ministre de culte (prêtres, pasteurs ou imams) ; pourtant les deux sont des hommes.

Nous attendons de nos dirigeants non seulement le respect des règles impératives, mais aussi des valeurs morales et éthiques auxquelles nous ne sommes capables nous-mêmes de nous soumettre parfois. Ils ne doivent pas se contenter de respecter les règles, ils doivent être exempts de reproches. Cela parait injuste mais c’est le revers de médaille de tout engagement public.

La réflexion éthique peut porter sur les actes passés, on parle alors d’éthique de la vertu, ou sur les conséquences des actes comme le fait le conséquentialisme. Au sein d’une société mondialisée et cosmopolite dans laquelle cohabitent de nombreuses éthiques différentes, la démarche contemporaine de l’éthique consiste donc selon JOHN RAWLS à rechercher un équilibre réfléchi.

Si le problème refait surface par rapport aux actes passés de nos dirigeants, c’est parce qu’ils ont soit manqué de vigilance ou été de très mauvaise foi à notre détriment. Faisons un parallèle à l’actualité relative à la volonté des dirigeants actuels de récupérer les domaines qui appartenaient à l’ÉTAT mais qui sont devenus depuis des domaines privés souvent au profit des dirigeants de l’époque de cette « privatisation ».

Ce qui est reproché à ces actes c’est beaucoup plus les problèmes éthiques qu’ils soulèvent que les problèmes de droit ; même si certains peuvent comporter des vices juridiques. La problématique soulevée est le fait de se trouver dans une position privilégiée et de bénéficier des actes comportant des conflits d’intérêts manifestes.

Il faut que nos dirigeants intègrent dans leur démarche ces éléments suivants :

La déontologie en tant que morales du devoir indépendamment de toute conséquence qui pourrait résulter de nos actions ;
La méthodologie en tant que processus visant à prévoir à l’avance plusieurs paramètres pouvant résulter de nos actions ;
La téléologie, qui se rapproche du précédent dans la recherche de la finalité de actions, non pas pour soi mais pour le plus grand nombre. Le privilège de gouverner est trop pour être consacré à son bien être personnel ou seulement quelques-uns ;
Et enfin le conséquentialisme qui doit se préoccuper des conséquences des actions qu’ils seront amenés à prendre.

Le tout dans une morale communicationnelle qui transcende la perception personnelle que nous pourrons avoir de nos propres actes, mais de ceux que les autres (en l’occurrence la masse populaire) peuvent recevoir comme message. C’est en cela que les sciences nouvelles de communications doivent servir à comprendre par des sondages, des enquêtes ou tout procédé permettant d’être en phase avec le peuple. A défaut, les actes les plus nobles à nos yeux, mal perçus peuvent être aussi perverses que les actes que les actes manifestement crapuleux.

Référence bibliographique

L’Éthique à Nicomaque (Aristote)

ÉthiqueSpinoza

Éthique sur wikipédia

Morale sur wikipédia

Mamoudou Montes DIAKITÉ

Amoureux de la philosophie

Coordinateur Général du cercle de réflexion

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