Dans un pays où le taux d’analphabétisme est très élevé, une consultation référendaire, surtout quand elle porte en particulier sur une Constitution, a moins de chance d’être crédible et sincère qu’une consultation électorale.

Dans une élection, on choisit un homme soit parce qu’on connaît sa compétence, sa rectitude morale, son projet de société, son programme( ce sont les critères de choix les plus souhaités), soit pour des considérations très subjectives : appartenance ethnique, régionale, raciale, communauté d’intérêts….).

Que l’on soit analphabète ou lettré , on un critère personnel sur lequel on fonde son choix.
Mais lorsqu’il s’agit de se prononcer sur une Constitution à l’occasion d’une consultation populaire, les choses sont beaucoup plus compliquées puisque, théoriquement, le citoyen est censé être dans l’obligation de comprendre son contenu avant de s’exprimer.

Le débat actuel sur la Constitution permet de relever tous les jours que même certaines personnes lettrées, pour ne pas dire des « intellectuels« , ne savent absolument rien d’une Constitution. Même dans les plus hautes sphères de l’Administration, il y a des « cadres » qui ont de graves insuffisances en terme de connaissance de cette norme suprême.

Lorsqu’on entend certains dire à Conakry, à Kindia et même à Paris qu’une nouvelle Constitution permettrait de lutter contre le viol de jeunes filles, le terrorisme, d’accélerer le développement économique du pays, de régler la question de la parité hommes- femmes, on réalise tout de suite le besoin de culture juridique de bon nombre de nos cadres. Que dire alors du pauvre paysan des hameaux les plus réculés du pays. Il est plus facile d’exploiter leur illétrisme pour leur faire avaliser n’importe quoi. On pourrait même dire à l’agriculteur qu’avec une nouvelle Constitution, il y aurait une bonne pluviométrie, les terres seraient plus fertiles et les moissons plus abondantes. On dirait au pêcheur qu’avec une nouvelle Constitution, la mer et les cours d’eau seraient plus poissonneux. Qu’est-ce qui pourrait empêcher l’un ou l’autre de croire à telles sornettes ? Surtout que l’objectif est justement de l’amadouer pour obtenir le résultat recherché.

Si l’on veut que le maximum de citoyens s’approprient d’une Constitution ou d’un projet de Constitution, l’idéal serait d’en traduire la teneur dans les langues locales qui ont un alphabet : le NKo par exemple en Haute-Guinée ou en Poular (caractères arabes), d’organiser des débats sérieux dans ces mêmes langues sur le sujet en mettant à contribution les radios rurales et communautaires.
Mais il est quasi certain que le souci des promotteurs d’un 3ème mandat ou d’un changement de Constitution est ailleurs.

L’objectif sera d’obtenir à tout prix un oui même s’il faut abuser du peuple dont on prétend pourtant défendre les intérêts et la souveraineté.
C’est pourquoi, cette idée de référendum doit inquiéter les défenseurs du principe de l’alternance et des acquis démocratiques.