L’opération dite de récupération des biens de l’État se poursuit de la plus rapide des manières, même au plus profond de la Guinée. Parmi les domaines ciblés dans la Savane guinéenne, figure celui du Compagnon de l’independance Fodeba Keïta. Mais cette résidence est-elle réellement concernée par l’opération ? Ce domaine est-il de l’Etat ? Pas tout à fait selon ses proches. La famille de l’auteur de l’Hymne national de Guinée soutient que son père a acquis ses biens immobiliers des mains des français au lendemain de l’independance du pays. Et cette acquisition est bien justifiée, même reconnue par les cédants.
C’est pourquoi la famille de Fodéba Keïta brandit des preuves pour mettre en évidence, l’apparence des dits domaines à son père. Cette famille accuse d’ailleurs des hauts placés de s’accaparer en toute illégalité de certains biens de l’homme. A en croire le fils de l’ancien ministre de l’intérieur, toutes les pièces justificatives existent pour démontrer l’acquisition légale des biens de son papa.
« Il est certainement indigne d’apposer une Croix sur un des rares biens restitués à Keita Fodeba », regrette son fils, qui ne trouve aucun fondement légal qui pourrait extorquer les biens de sa famille.
« KEITA Fodéba n’a ni spolié l’État guinéen, ni profité de sa position pour se faire vendre ou attribuer un bien du patrimoine public ou privé en Guinée ou ailleurs. Et puisque nous parlons de Siguiri, voici ce qu’en témoigne le télex du 20 Octobre 1959 envoyé au siège, sis à Marseille, par le représentant de la Compagnie Française de l’Afrique Occidentale (C.F.A.O), à propos des circonstances de l’acquisition des concessions qu’il a payé au meilleur prix, en étant l’un des rares guinéens à pouvoir payer cash », justifie t-il.
Par ailleurs, il soutient que le peu de biens que possédait son père a été obtenu par fonds propre et non des moyens financiers de l’Etat. Et ces biens sont même extorqués en partie par certains hauts cadres de l’administration guinéenne.
« Il faut noter que la plupart des biens qu’il a acquis, au comptant, a Siguiri, Kankan et Conakry restent encore détournés et/ou restitués à ce jour. Actuellement, il y a même un faut placé qui est en train de construire un vaste duplex sur l’un d’entre eux à Conakry.
Par fonds propres et aussi directement négociés par lui sur le fonds CACAO GHANÉEN remboursés sur les revenus des Ballets africains. Il a donné de la Guinée des biens qui lui assurent encore une prestigieuse présentation diplomatique à Paris ou encore à New York. Il y a donc des limites à la non reconnaissance qu’on ne peut franchir sans tomber dans l’indignité. Fodeba Keïta ne s’est attribué aucun bien public, et se trouve même à la source de la constitution du patrimoine bâti public de la Guinée indépendante par son refus de voir la France en rester Propriétaire », persiste Sidikiba Keita, avant de rappeler le rôle joué par son père dans la récupération des biens de la Guinée, des mains des colonisateurs.
« C’est bien KEITA Fodéba qui a décidé, aux premiers jours de l’indépendance, de saisir le patrimoine français en Guinée au profit de l’État guinéen, d’abord au niveau des camps militaires pour le compte de la future armée guinéenne. Il n’était pas encore ministre de la Défense, mais de l’Intérieur. Le dernier administrateur qui restait pour liquider les affaires courantes de la France, Gaston BOYER, en a témoigné.
Et comme on peut le lire dans les extraits ci-joint, le gouvernement guinéen avait bel et bien signé tous les accords et conventions garantissant à la France tous les intérêts dont la prévalence est consacrés par les accords qui ont prévalu et prévalent encore dans les anciens territoires français d’Afrique.
Autrement, comme toutes les ex-colonies françaises où le Palais du Gouverneur colonial est transformé en Palais Présidentiel, la France a exigé et obtenu le paiement d’un bail locatif, exigence étendue à l’ensemble du patrimoine colonial. Gaston BOYER témoigne nommément que même le franc CFA avait été signé lorsque Fodéba a contre-attaqué et conduit le reste du gouvernement à rejeter tous les accords néo-coloniaux qui venaient d’être conclus. À propos du Patrimoine de l’État à Siguiri, le document de référence est l’arrêté du 26 octobre 1966″, défend t-il.
Quant au domaine coché à Siguiri, Sidikiba Keita défie avec des documents à l’appui, les agents du patrimoine bâti.
« Il est loisible de constater que le lot 26, sis face à la place de l’église et appartenant à la famille KEITA Fodéba ne figure pas dans cette liste. Pourtant, ce bien s’est vu marqué d’une croix en faisant fi de l’arrêté qui est le document de référence », déplore t-il.
Pendant ce temps, la machine d’identification des biens de l’État continue sa marche. Reste donc à savoir si le cas du domaine de l’auteur de l’Hymne national de Guinée sera épargné suite à ces justifications ou si le dossier sera réexaminé comme ce fut d’ailleurs le cas pour d’autres maisons à Conakry.
Siradio Kaalan Diallo