Après lecture de votre opposition au projet d’interruption momentanée des réseaux sociaux pendant la période des examens nationaux, j’ai trouvé vos arguments moins pertinents pour asseoir votre conviction. En votre qualité de Ministre de télécommunication, je m’attendais à des propositions de solutions techniques pouvant empêcher l’utilisation des réseaux sociaux dans les centres d’examen. Très malheureusement je n’ai trouvé aucune proposition allant dans ce sens. Le seul argument que vous avancez est un argument d’ordre économique, car vous soutenez ceci : « Il est plus facile d’empêcher que les élèves entrent avec des téléphones ou tout autre équipement dans une salle d’examen que de couper les réseaux sociaux… Mais c’est contreproductif du point de vue sécurité des examens et c’est contreproductif du point de vue économique, parce que vous coupez, vous touchez une très grande partie, l’impact sur l’économie nationale est considérable. »

Monsieur le Ministre, je trouve ces arguments impertinents pour empêcher de couper les réseaux sociaux, sources de fraudes massives et généralisées pendant la période des examens nationaux. Je m’explique :

Votre premier argument, je cite « Il est plus facile d’empêcher que les élèves entrent avec des téléphones ou tout autre équipement dans une salle d’examen que de couper les réseaux sociaux »

Pour asseoir votre conviction, je vous conseillerais plutôt le contraire de votre argument. A mon avis, il est plus facile d’empêcher la fraude généralisée en coupant les réseaux sociaux que d’empêcher en se limitant à une simple fouille.

Le fléau de l’utilisation des téléphones dans les centres par les candidats ou autres acteurs du centre est plus compliqué que vous ne l’imaginez. Le risque zéro n’étant pas possible, quelque soit la rigueur, la vigilance ou les précautions avec lesquelles la fouille systématique des élèves ou des surveillants se fait, certains réussiront toujours à déjouer l’intelligence et entrer avec les téléphones pour s’en servir.

Un examen national se déroule sur toute l’étendue du territoire avec des centaines de milliers de candidats, des dizaines de milliers de surveillants, des milliers de centre, des milliers de chefs de centre et délégués. Oui, un examen national c’est tous ces milliers de personnes ! Pensez-vous que la fouille systématique des candidats est le moyen le plus efficace pour empêcher l’utilisation des réseaux sociaux dans un centre d’examen ? Pensez-vous que les surveillants, les chefs de centre et les délégués peuvent observer la rigueur dans la surveillance des candidats avec le même dynamisme ? Il n’y a pas une conscience collective, chaque homme est un cas particulier. Il y a toujours des bons et mauvais surveillants ; il y a toujours des bons et mauvais délégués, il y a toujours des bons et mauvais élèves. Quand les réseaux sociaux sont coupés, ils sont coupés pour tout le monde et pour tous les élèves. Quand une surveillance est bien faite pour un centre, rien ne rassure qu’il en sera ainsi pour les autres centres.

Quand on parle de fraudes via les réseaux sociaux, il faut voir tous ceux qui sont impliqués comme acteurs dans un centre d’examen donné. Je veux parler des délégués, des chefs de centre, des secrétaires, des surveillants, des policiers affectés pour la sécurité et enfin des candidats. En réalité, la fraude via les réseaux sociaux peut passer par n’importe quel acteur d’un centre d’examen, du délégué aux candidats.

Monsieur le Ministre, savez-vous qu’un seul téléphone connecté dans un centre d’examen peut servir tous les autres téléphones connectés des autres centres d’examen du pays en moins de 15mn ? Avec les réseaux sociaux, ton ami X a toujours un ami Y qui a aussi un ami Z et ainsi de suite. Bref, un réseau social est une chaine continue. C’est vous dire qu’avec les réseaux sociaux, la fraude ne peut pas être circonscrite, elle peut se généraliser et se propager dans tout le pays en moins d’un quart d’heure.

Monsieur le Ministre, je reste convaincu qu’il est plus facile et plus aisé d’empêcher la généralisation des fraudes sur toute l’étendue du territoire en coupant les réseaux sociaux qu’en empêchant les élèves et autres acteurs du centre d’entrer avec les téléphones par la fouille systématique.

Par ailleurs, votre second argument : «…..Mais c’est contre-productif du point de vue sécurité des examens et c’est contreproductif du point de vue économique, parce que vous coupez, vous touchez une très grande partie, l’impact sur l’économie nationale est considérable. »

A cet argument, je suis d’un autre avis. A mon entendement, aucune perte économique de moins d’une semaine ne peut égaler les conséquences d’un examen bâclé.

Que vaut une entreprise sans la ressource humaine qualifiée ? Sans la bonne formation, ces entreprises que vous tentez de défendre aujourd’hui, pourraient ne pas résister dans le temps. La formation va avec les évaluations. La rigueur dans les évaluations qualifie la formation. Quand un candidat sait qu’il peut se servir des réseaux sociaux pour réussir à son examen, quel effort de préparation fournira-t-il ? Existe-t-il une perte économique de moins d’une semaine qui pèse plus lourde qu’un examen bâclé ? Une génération bien formée peut réveiller une économie en faillite. Par contre, quelque soit la stabilité d’une économie, elle ne pourra jamais sauver une génération mal formée. Formons bien les hommes et les hommes feront le reste.

Monsieur le Ministre, dans votre intervention, je ne vois aucune proposition technique pour résoudre le problème posé. Si vous trouvez inopportun ou inefficace le blocage des réseaux sociaux de 8h à 15h sur toute l’étendue du territoire pendant la période des examens nationaux, quelle autre solution nous proposez-vous pour ne pas que les fraudes passent par les réseaux sociaux ? Est-il possible de brouiller uniquement les différents centres d’examen des réseaux sociaux ? Est-il possible d’équiper les centres des dispositifs détecteurs des téléphones connectés ? Si vous avez une solution plus efficace pour faire éviter aux examens nationaux les mêmes sorts que ceux des examens précédents, proposez-les, sinon, contentez vous d’encourager et d’accompagner celle deja proposée par les autres. Leur proposition, certes impopulaire, mais elle a une portée très efficace et très significative sur la qualité et la crédibilité des examens nationaux. Elle nous éloigne significativement et considérablement des fraudes massives généralisées insaisissables et incontrôlables. A noter que couper les réseaux sociaux c’est couper une partie de l’internet et non l’internet tout entier.

Cette expérience de blocage des réseaux sociaux pendant la période des examens nationaux n’est pas une nouveauté, plusieurs pays ont expérimenté la même chose et cela a normalement marché.

Est-il interdit d’imiter les bonnes pratiques ? Pourquoi la réalisation de ce qui se fait aisément ailleurs sans aucun bruit, dévient de la mer à boire en Guinée ?

Un pays ne se construit pas par tâtonnement. Un pays ne se mesure pas par son économie mais par sa ressource humaine. Ce sont les hommes qui valorisent l’économie et non le contraire.

Hawing Guillaume, enseignant – mathématicien