C’est un ouvrage de 81 pages. Intitulé Contribution du cercle de Boké à l’effort de guerre 1939 – 1945. En quatre chapitres, le Général Mohamed Diané fait la lumière sur l’histoire économique de l’Afrique et surtout l’effort de la Guinée à cette guerre.

En plus de ses fonctions militaires, l’auteur est un historien de formation et passionné de la littérature. Au cours de cette interview qu’il nous a accordé, l’auteur est longuement revenu sur les difficultés rencontrées lors de l’élaboration de son ouvrage et son objectif.

Maguineeinfos.com : Militaire et écrivain, comment avez-vous concilié les deux ?

Général Mohamed Diané : Je suis le Général de Brigade Mohamed Diané, Chef d’état-major de l’armée de terre (CEMAT). D’abord je suis de la 19e promotion de l’université Gamal Abdel Nasser de Conakry où j’ai étudié histoire. Ensuite, j’ai fait beaucoup de recherche et le travail d’écrivain est mon deuxième travail après  mon métier militaire. Donc, mes temps de loisirs sont réservés spécialement pour la recherche, la lecture et l’écriture.

Pourquoi le Cercle de Boké sachant bien qu’il n’était pas le seul cercle ?

Comme vous le savez, je suis Diané originaire de Kankan et ma maman est originaire de Boké. Ensuite, durant mon enfance, j’ai beaucoup de souvenirs de Boké c’est pour cela que j’ai choisi ce thème. Mais aussi, l’idée était de faire la lumière sur une partie de l’histoire de notre pays à savoir, l’effort de guerre pendant la deuxième guerre mondiale. Donc, le cercle de Boké à l’image des autres cercles de la Guinée française a contribué aussi bien sur le plan humain que sur le plan économique et financier à l’effort de guerre 1939 – 1945. Pour la période, comme la France était en guerre, en contrepartie, les colonies ne pouvaient plus  recevoir les équipements de la France. Donc, pendant la première partie de cette époque, c’était l’effort surtout humain c’est-à-dire les conscrits, les gens qui allaient partir sur les champs de bataille et après l’armistice, l’effort financier et économique ont pris une plus grande place. Donc, c’est ce travail que j’ai traité en quatre chapitres, d’abord la présentation sommaire du milieu géographique et humain, ensuite le cercle de Boké à la veille de la seconde guerre mondiale, en plus la participation effective du cercle de Boké à l’effort de guerre et les conséquences d’ordres humains, économiques et financiers et enfin la naissance du Rassemblement Démocratique Africain ( RDA) en octobre 1946.

Connaissant les difficultés pour les guinéens de conserver en bonne qualité les documents d’archives. Dites-nous quelles ont été les difficultés rencontrées dans votre travail de collecte d’informations ?

Les difficultés sont énormes parce que les archives pour le peu qui existait, le Colon est parti avec quand la Guinée accédait à l’indépendance. Donc tout d’abord, c’est à partir des rapports politiques annuels des commandants de cercle que j’ai pu avoir quelques éléments. Ensuite, j’ai fouillé aussi dans les journaux de cette époque-là. En plus, une monographie qui avait été écrite par un administrateur colonial du nom de Jean Figarol qui est très importante. Enfin, les sources orales c’est-à-dire les notables de Boké qui ont vécu cette époque-là.

Dans votre ouvrage, vous avez fait mention de plusieurs efforts consentis par la Guinée dans cette guerre. Dites-nous quels ont été les avantages pour le Cercle de Boké ?

Par rapport à la guerre, quand les noirs sont allés au front, ils ont compris qu’ils travaillaient et suaient comme les Blancs. Donc, ce masque qui existait avant entre le colonisateur et le colonisé est tombé. Ensuite, ils (noirs) ont eu la promesse et la possibilité non seulement de s’organiser, de créer le Rassemblement Démocratique Africain (RDA) mais aussi la possibilité par colonie de désigner des députés qui allaient leur représenter au Palais Bourbon et cela a permis avec les éléments de la Gauche en France de créer la loi Lamine Gueye qui a érigé en citoyen les habitants de Rufisque, Saint Louis, Gorée et Dakar. Ensuite, la loi Felix Houphouët Boigney qui a interdit le travail forcé dans toutes les colonies. Donc à partir de là, le RDA sera créé en octobre 1946 et les sections RDA vont suivre en 1947 dans toutes les colonies et ça, c’est le début de la prise de conscience et de l’accélération du processus pour l’indépendance de notre pays.

Parlez-nous du Fortin de Boké qui servait de base pour conquérir les militaires à l’intérieur.

Le Fortin est une maison coloniale qui avait été réalisée à l’époque de Faidherbe en tant que gouverneur de la colonie du Sénégal et indépendances. Parce que, dans les dépendances il y avait les rivières du sud et la Guinée était au début dans les Rivières du Sud. Et c’est sur ordre de Faidherbe vers 1867 que le Fortin a été  construit. Après il (Fortin) a servi de base pour la conquête de l’intherland. Donc, les coloniaux qui sont venus du Sénégal par le fleuve Rio Nunez à partir de l’océan atlantique qui sont rentrés dans cette mer intérieure et qui ont accostés à Boké. Donc, Boké était le premier poste français des rivières du sud en même temps, c’était une base pour préparer les expéditions pour rentrer à l’intérieur des terres en utilisant notamment la route Boké- Démoukoulouma – Soudan, la route que Réné Caillé a fréquenté jusqu’à Kankan. Ensuite, pour prendre la Barque à partir du fleuve Milo pour rejoindre le Mali à Tombouctou.

Nous savons qu’une guerre a toujours des conséquences néfastes tant sur le plan organisationnel que politique ou social. Quel désastre a connu le cercle de Boké après la guerre ?

Comme je l’ai dit tantôt, Du point de vue humain, plus de trois compagnies c’est-à-dire 371 personnes ont été recrutées. Ensuite, les gens qui ne sont pas partis étaient attelés ici à faire le travail pour la production agricole et tout ça pour donner les moyens, les vivres à ceux qui étaient sur le front. Donc, cela a fait que les relations entre les communautés et l’administration coloniale qui était représentée par les Chefs de canton étaient difficile parce qu’au fur et à mesure que les moyens étaient énormes, après c’était épuisant pour le cercle.  Donc, cela a beaucoup discrédité les relations entre les Chefs de canton et les administrés.

Qu’est-ce que le lecteur doit retenir de ce livre ?

Le lecteur doit retenir de ce livre que la Guinée a participé comme les autres colonies françaises à l’effort de guerre 1939 -1945 bien avant, la Guinée a participé aussi à la guerre de 1914 – 1918. Donc la Guinée a participé aussi bien sur le plan humain en fournissant les tirailleurs qu’on appelle à tort d’ailleurs les tirailleurs sénégalais parce que c’est les unités de recrues venant des différentes colonies de l’Afrique de l’ouest y compris la Guinée. Après, l’effort a été aussi économique et financier et cela a eu les conséquences sur le cercle et sur la Guinée française à cette époque.

 

Interview réalisée par Saramadiya