« Ne sacrifiez jamais vos convictions politiques pour être dans l’air du temps ». C’est une des plus belles phrases attribuées à John Fitzgerald Kennedy. Mais voilà que les « talibés » refusent même de sommeiller, parce que les « évadés » lorgnent désormais le trône du « roi ».
Hier, il était « Gorkö soussaï », quand il devait aller au front politique, et Dieu seul qu’il est allé de toutes les manières. Pour paraphraser Le Colosse, il faisait « le sale boulot ». Applaudi de tous ses camarades, chouchouté par les médias, promis à de grands destins dans le parti. Mais aujourd’hui qu’il vient réclamer son dû, on voudrait le faire passer pour un simple « perturbateur », un « insultologue* » et le « visage de la trahison ». Alors qu’il est resté lui-même, « audacieux », « ambitieux », « apte au débat et à la confrontation politiques ».
Bah Oury est passé par là. Dans sa « chute » à l’UFDG, ils étaient tous bras dessus, bras dessous, y compris Ousmane Gaoual Diallo – au festin pour « cuire sa peau ». Même quand la Cour D’appel a confirmé le jugement rendu en Première Instance par le TPI de Dixinn, qui avait estimé que l’exclusion de M. Bah au sein de l’UFDG était illégale, parce que non conforme aux statuts et règlement intérieur du parti !
Aucune condition n’avait été réunie pour rétablir Bah Oury dans ses droits au sein du parti. Au droit, on a opposé la virulence, la violence, l’animosité, à tel point que le pauvre s’est résolu à ce divorce douloureux. Mais Ousmane Gaoual Diallo réalise-t-il enfin qu’ « il ne faut pas croire que ça n’arrive qu’aux autres » ? Le respect des règles n’a d’intérêt que la protection de tous. Peut-il alors prétendre avoir raison, s’il continue à nier sa faute dans l’exclusion de Bah Oury de l’UFDG et dans le fait d’avoir participé à botter en touche une décision de justice qui était pourtant claire ?
Comme quoi, en politique, et très souvent, les exceptions ne valent que pour les circonstances que l’on choisit et pour les intérêts qu’on défend.
C’est tout comme chez les « voisins » où les Alphayïstes* sont restés comme les derniers retranchés de la seconde guerre mondiale qui ne se rendirent compte que très tardivement que la guerre était bien finie. Au paravant, les rares autrefois qui ont cru à la possibilité d’un renouveau à la tête du parti ont été vus en « traites », et traités comme tels.
Le débat politique se rapporte désormais au crâne du chef, aux personnes et leurs sensibilités. Quand on n’est pas d’accord avec une personne, on est forcément contre celle-ci ; c’est de la haine contre sa personne. On voudrait ainsi faire de l’adhésion politique la moutonnerie bien pensante des élites des partis.
Mais comment réconcilier le militantisme politique avec la lucidité citoyenne quand ce sont des « intellectuels » qui sont les premiers à pousser le culte de la personnalité à « l’idolâtrie politique » ? Que faut-il pour amorcer véritablement le processus de persuasion du peuple sur ce qu’André Breton avait à raison intitulé « Mettre au ban les partis politiques » ? Simone Weil qui l’inspira pour ce travail avait été plus loin en écrivant » Note sur la suppression générale des partis politiques « .
Dans une farce démocratique où on a fini par ériger des roitelets au sommet des partis, il est très illusoire de croire, même le temps d’un éclair, qu’il s’agit de démocratie. Quand le débat démocratique est biaisé au sein des partis politiques, c’est le tremplin pour de futurs autocrates au sommet de l’Etat. Quand les partis politiques sont à caractère ethnique, c’est le terreau du tribalisme d’État et la gestion clanique des affaires publiques. Quand les principes proclamés sont défendus au gré du vent, on récolte une démocratie aérienne.
Rien de nouveau me dira-t-on. Pourtant, le peuple de Guinée dans sa nombreuse jeunesse reste encore comme un spectateur de son destin. Mais aujourd’hui, c’est le temps du rappel, demain, ce sera celui de la rétribution.
Par Ali CAMARA