Le vendredi, 30 mai 2025, le Conseil National de la Transition (CNT) a adopté un nouveau Code de la pêche maritime, marquant une refonte significative de la législation encadrant ce secteur vital pour l’économie guinéenne. Ce nouveau texte, fruit d’environ deux ans de travail et de consultations avec divers partenaires nationaux et internationaux, abroge et remplace le Code de 2015. Il vise à corriger les imperfections du précédent cadre légal, à intégrer les évolutions normatives internationales et à doter la Guinée d’un outil juridique plus accessible, complet et adapté aux enjeux actuels.
I. Les Lacunes du Code de 2015
Le Code de la pêche maritime de 2015 avait été élaboré dans un contexte difficile, marqué par la recrudescence de la pêche Illicite, Non déclarée et Non réglementée (INDNR) et alors que la Guinée était listée comme pays tiers non-coopérant par l’Union Européenne. Bien que centré sur la lutte contre la pêche INDNR, ce code a rapidement montré ses limites.
Parmi les principales critiques formulées à l’encontre du Code de 2015, on note :
1. Une législation complexe et des sanctions appliquées uniformément aux pêches industrielle et artisanale, sans distinction proportionnée. Cette uniformité s’est avérée particulièrement inadaptée aux infractions commises par les navires de pêche artisanale.
2. La négligence des aspects sanitaires des produits halieutiques, un enjeu crucial pour la santé publique et l’accès aux marchés internationaux.
3. L’absence d’un Règlement général d’application du Code, ce qui a maintenu un cadre juridique dépendant d’un Règlement d’application datant de 1997 et de textes spécifiques épars.
a) Des erreurs de renvoi au sein même du texte.
b) Comparativement, le Code de 2015 comptait 260 articles répartis en dix chapitres, abordant moins de questions que le nouveau code malgré un nombre d’articles plus élevé.
Ces lacunes ont motivé l’implication de partenaires tels que la Banque Mondiale, le Partenariat Régional pour la Conservation de la zone côtière et Marine (PRCM) et la FAO pour actualiser le cadre juridique.
II. Les Apports Majeurs du Nouveau Code de la Pêche Maritime (2025)
Le nouveau projet de loi, structuré en neuf titres et cent quatre-vingt-dix articles, se veut plus accessible et complet. Il a été élaboré en collaboration avec les administrations et les professionnels du secteur. Voici ses avantages et innovations notables:
1. Renforcement de la Lutte contre la Pêche INDNR et Alignement International :
a) Intégration de concepts issus de conventions internationales récentes, notamment l’Accord relatif aux Mesures du Ressort de l’Etat du Port (AMREP).
b) Prise en compte des principes de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (CNUDM), du Code de conduite pour une pêche responsable de la FAO, de l’accord sur les stocks chevauchants et les stocks de poissons grands migrateurs, et d’autres instruments internationaux pertinents.
c) Élaboration d’un plan d’action national de lutte contre la pêche INDNR.
2. Amélioration de la Gouvernance et de la Transparence :
a) Introduction de concepts liés à la Fisheries Transparency Initiative (FiTI) pour une gestion responsable et transparente des pêcheries.
b) Mise en place d’un cadre juridique solide servant de socle à un Règlement général d’application complet, déjà en projet.
c) Meilleure définition du statut et renforcement des prérogatives des inspecteurs des pêches, des inspecteurs sanitaires et des observateurs des pêches.
3. Prise en Compte Cruciale des Aspects Sanitaires :
a) Une attention particulière est accordée aux questions sanitaires tout au long de la chaîne de valeur des produits halieutiques. Ceci vise à garantir la santé publique et à faciliter l’accès des produits guinéens aux marchés internationaux, plus rémunérateurs.
b) Extension des sanctions aux entreprises de traitement de poisson, permettant un contrôle accru sur toute la chaîne.
4. Adaptation des Sanctions et Renforcement des Droits :
a) Les amendes encourues en cas d’infraction sont désormais différenciées entre la pêche industrielle et la pêche artisanale, y compris pour les manquements aux normes d’hygiène. Le Code de 2015 prévoyait des sanctions similaires, jugées disproportionnées pour la pêche artisanale.
b) Renforcement des droits de la défense pour les personnes mises en cause, qui seront présentes ou représentées et entendues lors des procédures transactionnelles.
5. Autres Dispositions Clés :
a) Le Titre I définit l’objet, le champ d’application, les définitions, le patrimoine halieutique national et les principes généraux.
b) Le Titre II traite de l’aménagement des pêcheries, incluant la recherche scientifique et la coopération internationale.
c) Le Titre III détaille le régime des autorisations pour les activités commerciales et non commerciales (recherche, pêche sportive, etc.).
d) Le Titre IV fixe les dispositions applicables aux activités de pêche (interdictions, tailles minimales, marquage, déclaration de captures, suivi des navires).
e) Le Titre V est consacré à la valorisation, commercialisation et sécurité sanitaire des produits.
f) Le Titre VI porte sur le suivi, contrôle, surveillance et police des pêches (SCSP).
g) Les Titres VII, VIII et IX traitent respectivement de la compétence et procédure administrative/juridictionnelle, des infractions et sanctions, et des dispositions transitoires et finales.
h) Introduction de mesures préventives concernant les dispositifs de concentration de poissons (DCP).
i) Allègement général des dispositions du Code pour le rendre plus accessible.
Par Sékou Oumar CAMARA