Le président refuse toujours de reconnaître sa défaite, mais sa stratégie pour contester la victoire de Joe Biden semble assez confuse.

On l’a à peine vu depuis le 3 novembre, jour du scrutin. Il a joué deux fois au golf ce week-end en Virginie. Lundi, il n’avait rien au programme. Son dernier briefing officiel avec ses services de renseignements, si l’on en croit son agenda, remonte au 1er octobre. Quant à la cellule de gestion du Covid, il ne l’a pas consultée depuis des mois… La campagne l’a totalement accaparé, et ce n’est pas fini. D’après ses proches, il passe ses journées collé aux écrans de télé à téléphoner à ses confidents pour organiser sa défense. Et, évidemment, il tweete pour dénoncer des fraudes électorales massives et accuser les démocrates de lui « voler » sa place, même s’il n’y a aucune preuve d’irrégularités.

Bref, une semaine après le scrutin, Donald Trump n’a toujours pas concédé sa défaite. « Ce mot n’est même pas dans notre vocabulaire pour le moment, » a déclaré Jason Miller, un de ses conseillers. D’habitude, le président vaincu téléphone à son rival pour le féliciter et fait un discours aimable dans lequel il appelle à oublier les divisions. Pour l’instant, il agit comme s’il avait été réélu et vient de limoger le ministre de la Justice. D’autres sont sur la sellette, dont Christopher Wray, le directeur du FBI, et la patronne de la CIA.

Au sein de la Maison-Blanche, il y a apparemment deux clans qui s’opposent. L’un le pousse à admettre le résultat de l’élection, conscient qu’il y a peu de chance de le changer. L’autre, mené notamment par ses deux fils et Rudolph Giuliani, son avocat, l’encourage à tout mettre en œuvre pour contester le scrutin. De son côté, Melania a publié un tweet qui soutient son mari.

Trahi par Fox News

Au fil des jours pourtant, le président apparaît de plus en plus isolé. Depuis les élections, on a très peu vu Mike Pence, le vice-président. Benyamin Netanyahou, le Premier ministre israélien, qui a courtisé tant et plus son homologue américain a tweeté qu’il « attendait avec impatience de travailler avec » Biden. Lundi en fin d’après midi, Fox News a stoppé la retransmission d’une conférence de presse de la porte-parole de la Maison-Blanche qui ressassait les accusations de fraude sans fondements. « À moins qu’elle n’ait plus de détails pour étayer ses dires, je ne peux pas en toute bonne foi continuer à vous montrer ce point de presse », a déclaré le présentateur. Fox News qui censure le président, on aura tout vu !

Ces derniers jours, Donald Trump aurait discuté de la possibilité de nouveaux meetings électoraux pour mobiliser ses troupes. Et son équipe envoie dix textos et e-mails par jour à ses supporteurs pour solliciter des dons pour son « Fonds de défense des élections ». Il a aussi annoncé de nouveaux recours en justice. Malgré ses menaces, il n’a toujours pas lancé un recomptage des voix dans le Wisconsin, peut-être parce qu’il est un peu effarouché par la facture de 3 millions de dollars.

L’offensive judiciaire est décidément moins sophistiquée que l’énorme machine montée par James Baker en 2000 en Floride. Cette grande figure politique, qui a été notamment secrétaire d’État de Bush père, avait rassemblé en un temps record une armada de stars républicaines du barreau, parmi elles, trois futurs membres de la Cour suprême, pour combattre Al Gore.

Donald Trump, lui, a nommé David Bossie, un de ses conseillers qui, juste après sa nomination, a été testé positif. L’avocat jusqu’ici le plus visible est l’inénarrable Rudolph Giuliani, l’ex-maire de New York et âme damnée du président, connu pour ses déclarations à l’emporte-pièce. Samedi, le président Trump a annoncé via Twitter « une grande conférence de presse » au Four Seasons à Philadelphie organisée par Giuliani. Il a ensuite corrigé son message en disant qu’elle aurait lieu non pas à l’hôtel chic, mais devant le Four Seasons Total Landscaping, un pépiniériste coincé entre un sex-shop et un crématorium. Est-ce une erreur des équipes ? En tout cas, la twittosphère en a fait des gorges chaudes.

Depuis les élections, les avocats de Trump ont lancé plusieurs recours, mais sans grand succès. Certains ont été rejetés par les juges, faute de preuves. Au grand dam de ses partisans qui dénoncent le manque de préparation des équipes de juristes. « Ces recours sont conçus pour permettre à Trump de sauver la face et pour qu’il puisse ainsi dire au final qu’il a perdu, car les élections ne se sont pas jouées à la loyale », résume un de ses conseillers, au Washington Post.

Donald Trump peut au moins se targuer de maintenir son pouvoir sur le parti. À part quelques pontes, dont l’ex-président George W. Bush, qui l’ont appelé à reconnaître sa défaite, la plupart des républicains sont restés silencieux.

Ça promet une passation des pouvoirs agitée. Le président Trump a interdit aux membres de ses différents ministères de coopérer avec les équipes de Joe Biden, comme le veut la tradition, pour préparer la transition. Signe que le président n’est quand même pas tout à fait sûr de rempiler, il aurait, selon le site Axios, déjà dit qu’il pensait se représenter en 2024.

Source: Lepoint